— Déçu ? fit Jag, irrité. Jaina n’a toujours pas été retrouvée, et vous pensez que je serai déçu de rater la cérémonie ?

Soleils Jumeaux Trois se tut. Sa tentative d’alléger l’atmosphère était tombée à plat.

Jag double-cliqua pour rappeler à ses pilotes de ne pas encombrer la fréquence de l’escadron. L’absence de Jaina l’inquiétait, mais il devait lui faire confiance. Elle était capable de se débrouiller. De plus, si un malheur lui était arrivé, Leia l’aurait perçu. Or, elle n’avait pas appelé à l’aide à travers la Force. Donc, elle contrôlait la situation.

Pour le moment, Jag devait se concentrer sur sa tâche, et attendre.

Il avait décidé de patrouiller les abords de l’orbite du Sélonia, pour vérifier qu’aucune activité illicite ne s’y déroulait. Les contingents bakuriens et p’w’ecks étaient calmes. Les deux grands vaisseaux d’attaque étrangers, l'Errinung’ka et le Firrinree, orbitaient dans un quadrant diamétralement opposé aux deux vaisseaux de protection locaux, le Défenseur et le Sentinelle.

Ce dernier était entouré de deux escadrons de chasseurs P’w’ecks, plus deux vaisseaux relativement modestes. Si quelque chose tournait mal, ils feraient beaucoup de dégâts avant que les Bakuriens aient le temps de réagir. Jag espérait que rien de tel ne se produirait, mais il préférait se tenir prêt à tout.

… Il faut toujours anticiper les mouvements ennemis, lui avait dit son père. Pars du principe que tes adversaires ont deux longueurs d’avance sur toi, et bats-toi pour les devancer de trois !

Suivi par deux équipiers, Jag lança sa griffe dans un grand arc, autour du Sélonia. Sous l’œil apparemment indifférent des forces armées qui l’entouraient, la frégate se dorait au soleil de Bakura…

Il se sentit frustré d’être tenu éloigné de tout ce qui se passait à la surface de Bakura… Mais si rien de mal n’arrivait, il ne serait pas déçu, loin de là ! Il était d’accord avec Leia : cette alliance avec les P’w’ecks serait peut-être l’événement le plus positif arrivé à Bakura depuis longtemps…

La voix de l’opérateur com, sur le Sélonia, interrompit le cours de ses réflexions.

— Décollages détectés !

— Je les vois, dit-il en pointant sa griffe vers les nombreux vaisseaux.

Ses senseurs signalaient leur départ du Sentinelle.

— La Flotte Bakurienne nous a-t-elle avertis de ces décollages ? demanda-t-il.

Plus de vingt bâtiments avaient quitté le croiseur, et d’autres en sortaient toujours.

— Je pense que ces gens ne s’y sentent pas obligés, dit l’opérateur. Mais je vais leur poser la question.

Jag était assez près pour identifier le type de vaisseau sortant des baies de décollage. Et ça l’intrigua : il y avait des ailes Y et X de la Flotte Bakurienne, plus un nombre équivalent de chasseurs droïds ssi-ruuvi – p’w’ecks, se força-t-il à se rappeler – de classe Essaim.

— Apparemment, une garde d’honneur, dit l’opérateur du Sélonia. J’ai averti la capitaine Mayn.

Une garde d’honneur ? Oui, c’était plausible. Les vaisseaux qui adoptaient une formation élégante avaient visiblement beaucoup pratiqué ces manœuvres. Une belle démonstration de coopération…

Pourtant, ça le troublait. Il y avait maintenant près de cinquante vaisseaux. Bien trop pour que Soleils Jumeaux puisse les combattre…

Il faut toujours garder trois longueurs d’avance…

— Pensez-vous que ça les gênerait si Soleils Jumeaux se joignait à eux, par respect ? demanda-t-il au Sélonia.

— Je leur pose la question…

En attendant, Jag prévint les pilotes de son escadron, leur demandant de le rejoindre au plus vite.

— Nous arrivons, répondit Jocell.

Jag suivit autour de la planète un vol de trois vaisseaux, dont deux chasseurs droïds qui ne parurent pas réagir à sa présence. Mais un appel du Sélonia lui confirma qu’ils s’en étaient avisés.

— Ils nous prient de rester à l’écart, dit la capitaine Mayn. J’ai répondu que nous le ferions, mais en prenant les mesures nécessaires à notre sécurité.

Jag sourit. En d’autres termes, il pouvait agir à sa guise – à condition de ne pas provoquer d’altercation.

Il continua à suivre les trois chasseurs. Le nombre de vaisseaux de la « garde d’honneur » venait de dépasser la centaine, et il augmentait toujours…

 

Nous sommes attaqués !

Saba se réveilla en sursaut et essaya de s’orienter. Elle s’était allongée sur un fauteuil du luxueux pont d’observation de la barge… et assoupie. Dans un rêve paisible, sur les Collines de Listian, sous un ciel rouge et nuageux, elle était allongée sur un rocher, écoutant les grognements de ses frères de couvée…

Le cri de Mara, à travers la Force, la ramena abruptement à la réalité. Les grognements de son rêve étaient en fait le bourdonnement des répulseurs de la barge, glissant sur la surface gelée de la planète.

Saba rejoignit ses compagnons.

La barge, un vaisseau ovale, glissait à la surface des glaciers. Les trois ponts passagers formaient une bosse peu élégante au sommet de l’engin, entouré de ses nombreux générateurs et répulseurs. Ses boucliers l’isolaient de la morsure du vent glacial, qui mugissait à l’infini.

Autour de la barge, quatre tourelles d’artillerie étaient pointées sur une cible voilée par les tourbillons de givre que soulevait le vaisseau.

— Il y en a deux autres derrière nous, annonça Soontir Fel.

Sur l’écran, les objets suspects semblaient plus petits que des snowspeeders, mais ils étaient aussi bien armés et protégés par des boucliers. L’ordinateur ne se trompait pas.

— Des engins monoplaces, je suppose, vu leur vitesse.

— Des pirates ? demanda Luke Skywalker.

— Peut-être…

Fel orienta la barge vers les snowspeeders, les obligeant à se détourner.

— Ne devrions-nous pas avertir le spatioport ? suggéra Mara.

— J’ai déjà essayé, répondit Fel.

Il fit dévier la barge. Son bouclier heurta celui d’un des speeders.

— Nos communications sont brouillées, continua Fel.

— Si ce ne sont pas des pirates, serait-ce vos ennemis ? demanda Stalgis.

— Pourquoi pas ? grogna Fel. Mais lesquels ? Peu importe… Nous ne les distancerons pas. Notre seul avantage, ce sont nos boucliers. Je suis raisonnablement sûr qu’ils ne peuvent pas les transpercer. Nous devrions être en sécurité dans la barge.

Syal Antilles posa une main sur son épaule.

— Dès notre arrivée au spatioport, la Sécurité les mettra en déroute.

Une explosion secoua la barge. Des pans de glace ricochèrent au bord du bouclier. Une autre fendit la banquise, devant eux. Fel vira pour éviter la zone instable. Mais dès qu’il voulut reprendre son cap initial, des tirs des snowspeeders l’obligèrent à battre en retraite.

— Oui, si nous arrivons au spatioport ! lança-t-il à Syal.

— Ils veulent nous dérouter, dit Mara.

— Exact ! grogna Fel. S’il n’y avait que moi, je courrais le risque de traverser ces crevasses, mais…

Il regarda Syal.

— Je suis désolé, dit Luke. C’est après nous qu’ils en ont.

— N’en soyez pas si sûr. Certains administrateurs ne m’apprécient guère, car je prétends modifier leur manière d’être. Il suffirait que l’un d’eux me poignarde dans le dos…

Une autre explosion retentit, forçant la barge à dévier encore plus vers tribord.

— Quoi qu’il en soit, nous sommes tous impliqués ! lança Mara.

— Si je me rendais, dit Fel, ils vous laisseraient peut-être tranquilles…

— Non ! cria Syal. Pas question !

— Ce serait un sacrifice inutile, renchérit Luke. Ils ne laisseront pas de témoins. Vous le savez. D’ailleurs, ils se serviraient volontiers de nous comme de boucs émissaires… Quoi de plus plausible qu’une querelle entre de vieux ennemis – surtout si les accusés sont tués en résistant à leur arrestation ?

— Que suggérez-vous ?

— Inutile de fuir… Et nous ne pouvons pas les battre par la force brute, résuma Luke. Changeons de tactique.

— Ce qui veut dire ? demanda Syal.

Skywalker sourit.

— Surprenons-les…

 

Leia, Yan, C3PO et les deux gardes noghris s’installèrent à la place qu’on leur avait réservée. Le stade était immense. Bien entendu, la délégation de l’Alliance Galactique, au nombre des invités d’honneur, était placée dans les tribunes supérieures, à la droite du Premier ministre Cundertol et des sénateurs les plus en vue. La journée était chaude. Des parasols à répulseurs planaient au-dessus de la foule. Leia vit flotter des bannières, sans parvenir à lire leurs messages. Des supporteurs et des opposants au Keeramak et à ses révolutionnaires p’w’ecks devaient les brandir. C’était un grand jour pour Bakura.

Pour l’instant, il ne se passait pas grand-chose. Le Premier ministre n’étant pas arrivé, il y avait gros à parier qu’il éviterait l’Alliance Galactique dans la mesure du possible. Cinquante soldats p’w’ecks entouraient la zone critique, assez loin des gradins les plus proches du stade.

Yan serra la main de sa femme, qui sentit une vague d’amour déferler en elle. Aux moments les plus difficiles, il était toujours là pour la soutenir.

— Tu crois que la pluie attendra ? demanda-t-il.

Elle suivit son regard. Des nuages s’accumulaient à l’horizon, promettant un orage tropical.

— Sinon, nous serons mouillés…

— Super ! Une raison de plus d’apprécier la journée…

Une fanfare annonça l’arrivée des chefs bakurien et p’w’eck. Vêtu d’une magnifique robe pourpre, le Premier ministre Cundertol et le Keeramak guidaient vers le centre du stade des dignitaires humains, kurtzen et p’w’eck.

Au son de l’hymne bakurien, ils s’adressèrent à la foule.

— Mes chers concitoyens, commença Cundertol, sa voix amplifiée par les haut-parleurs, en ce jour magnifique, je vous souhaite la bienvenue. Avec nos nouveaux alliés, les P’w’ecks, nous entrons dans une ère de paix et de prospérité. Désormais voisins et amis, nous ferons nôtres les vérités universelles qui unissent toutes les cultures. Aujourd’hui, Bakura accomplit sa destinée, libérée de la peur de ses anciens ennemis. Elle travaillera avec ses nouveaux alliés à construire un avenir commun !

A part égale, la foule se répandit en acclamations – et en tollés.

Le Premier ministre céda la place au Keeramak. Le Ssi-ruu mutant était magnifique dans son harnais d’argent étincelant décoré de rubans multicolores et des clochettes au doux tintement. Ses écailles scintillaient sous la lumière matinale. Même les nuages qui s’accumulaient ne dissimulaient pas sa beauté.

Le son de sa voix puissante retentit dans le stade.

— Peuple de Bakura, commença l’interprète quand il eut achevé la première partie de son discours, je suis fier d’être devant vous en ma qualité de chef d’un peuple libéré. Les P’w’ecks, qui ne sont plus prisonniers d’un régime fondé sur la cruauté, se joignent à vous pour une communion spirituelle alors que nos deux grandes nations nouent des liens encore plus forts que ceux de l’amitié ! Avec la signature de ce traité, nous ne ferons plus qu’un. Nos destins seront liés à jamais !

La réaction de la foule fut aussi mitigée que pour Cundertol, mais cela ne sembla guère perturber les deux dirigeants. Ils se saluèrent, puis le Premier ministre et sa suite repartirent vers leur tribune. Comme Leia s’en doutait, il fit un bref signe de tête dans sa direction.

Yan marmonna qu’il n’échangerait pas un tas de bouses de mynocks contre Cundertol… Il n’y avait pas trace du Premier ministre adjoint. Personne n’avait mentionné son absence.

Leia en fut intriguée.

Des prêtres p’w’ecks également ornés de rubans entamèrent un chant monocorde, pendant que le Keeramak parcourait la zone dégagée, éparpillant une poudre scintillante autour des officiants. Régulièrement, il relevait la tête et répondait au chant par une phrase dans sa langue.

Cette fois, il n’y eut pas d’interprète pour traduire.

— Comprends-tu ? demanda Leia à C3PO.

— En partie seulement, maîtresse. Le langage n’est pas celui que les P’w’ecks utilisent dans la conversation courante. C’est apparemment une langue antique rituelle, peut-être conservée pour…

— Epargne-nous les détails, Bâton d’Or, coupa Yan, irrité. Contente-toi de traduire, d’accord ?

— Comme vous voudrez, monsieur. Le Keeramak s’adresse à l’esprit vital de la galaxie, le suppliant de l’écouter et d’exaucer ses désirs. « La lumière dorée de cette matinée est à vous », dit-il. « Le ciel bleu et les nuages blancs sont vôtres. Quand les feuilles sont vertes et que les fleurs s’épanouissent, vous êtes là. Quand les enfants grandissent et deviennent forts de corps et de cœur, vous êtes là. »

— Très poétique, marmonna Yan. Il en a pour combien de temps ?

— La cérémonie durera une heure.

— Super ! (Yan allongea les jambes et croisa les mains sous sa nuque.) Leia, réveille-moi quand ce sera terminé !

 

La camionnette à répulseur s’aligna à une entrée non gardée du stade. Conduisant le véhicule aérien qui suivait la camionnette, Goure la dépassa, tourna au coin et s’arrêta. Tahiri descendit la première, imitée par le chauffeur. Ils arrivèrent à temps pour voir Harris entraîner dans le stade Jaina, Malinza Thanas et deux autres personnes.

— Bravo, la Sécurité ! grogna Tahiri. Il n’y a personne ! Ils sont entrés comme dans un moulin !

— C’était sans doute arrangé à l’avance, dit le Ryn, dont la queue frappait en rythme les jambes de Tahiri. Si nous sommes assez rapides, nous pourrons peut-être en profiter aussi !

D’un pas vif, ils approchèrent de l’entrée, conscients que l’alarme pouvait se déclencher à tout instant. Mais ils se glissèrent dans le stade sans être repérés. Le grondement de la foule les enveloppa. Le spectacle était sûrement impressionnant.

— Percevez-vous votre amie ? demanda Goure.

Pour Tahiri, l’esprit de Jaina brillait comme une baliseet ce, avant même qu’elle quitte le bureau de Blaine Harris. Alors que Tahiri et Goure essayaient de convaincre un garde de les laisser voir le Premier ministre adjoint, la jeune femme avait détecté la présence de Jaina… Avec Goure, elle avait quitté les bureaux ministériels et trouvé une interface droïd, grâce à laquelle le Ryn avait pu déterminer le départ d’Harris avec Jaina…

Ignorant où le Premier ministre adjoint l’emmenait, ils s’étaient lancés à leur poursuite. Tahiri commençait à désespérer de rejoindre Harris à temps pour arrêter la cérémonie. Que sa destination soit le stade était une chance…

Harris voulait peut-être aussi arrêter la cérémonie avant que le plan de Cundertol – quel qu’il soit – porte ses fruits.

Mais quelque chose, dans l’esprit de Jaina, mettait Tahiri mal à l’aise… Si elle était prisonnière d’Harris, ça signifiait quoi ? Tahiri trouvait de plus en plus ardu de déterminer qui était de quel côté… Pas facile de prendre les bonnes décisions dans ces conditions !

— Alors ? demanda Goure.

— Oui, je la capte…

Ils suivirent Jaina à l’intérieur du stade.

 

— Où nous emmenez-vous ? demanda Jaina.

Harris ignora la question.

Salkeli la poussa avec la crosse de son arme. Le message était limpide : bouclez-la et avancez.

Elle suivit le Premier ministre adjoint au pied d’une rampe. Puis ils traversèrent une enfilade d’arcades à peine assez hautes pour lui et atteignirent une porte assez large pour laisser passer un landspeeder.

Blaine Harris saisit un code alphanumérique sur le clavier de la porte, qui s’ouvrit aussitôt. Ils arrivèrent dans une réserve d’équipement quasiment vide. Un conteneur trônait au centre.

— Un peu Spartiate à mon goût…, lâcha Jaina.

— Un endroit qui en vaut un autre pour mourir, à votre avis ? lança Harris. Regardez cette boîte, et dites-moi ce que vous voyez.

Jaina s’accroupit, faisant toujours semblant d’avoir les poignets attachés.

— Un détonateur télécommandé ?

— Excellent ! fit Harris. Maintenant, appuyez sur le bouton rouge.

Jaina lâcha un rire sans joie.

— Vous n’êtes pas sérieux !

— Obéissez ! grogna Harris en plaquant le canon de son arme sur le front de Malinza. Ou je la tue.

Jaina croisa le regard de la jeune fille. Harris ne menaçait pas en vain.

— D’accord…

Elle poussa le bouton. Un minuteur numérique s’enclencha, égrenant un compte à rebours de dix minutes.

— Parfait, dit Harris. Maintenant que vos empreintes digitales sont sur ce bouton, votre sort est réglé. Vous morte et le stade pulvérisé, personne ne prendra votre défense.

Jaina se força à garder son calme.

Bientôt. Encore un peu de patience…

Elle se redressa.

— Vous savez, faire sauter le stade n’améliorera pas vos relations avec les P’w’ecks.

— Si c’était mon intention, cet acte compromettrait assurément nos relations avec les P’w’ecks. Mais je ne veux pas faire exploser tout le stade, seulement l’endroit où mes ennemis ont pris place.

Mes ennemis…

— Le Premier ministre Cundertol ? Mes parents ?

— Oui, ma chère. On croira que vous avez posé la bombe pour faire échouer le traité avec les P’w’ecks. Les Jedi ne voulaient pas que Bakura quitte l’Alliance Galactique, et ils n’ont reculé devant rien… Vos parents auront été délibérément sacrifiés. Abusée par vos belles paroles, Malinza Thanas m’a enlevé et contraint à vous introduire dans le stade, où la bombe attendait… Au dernier instant, vos plans ont été percés à jour par la loyale Malinza qui, au prix de sa vie et de celle de ses amis, a permis ma libération. Hélas, pas à temps pour empêcher la bombe d’exploser… Le Premier ministre sera tué, avec la plupart des sénateurs.

— A ce moment, vous interviendrez pour vous assurer que la cérémonie aura lieu comme prévu, termina Jaina.

— En souvenir de la courageuse Malinza Thanas, bien entendu. Poétique, non ?

— Abominable ! cracha Malinza d’une voix fêlée.

— Efficace me paraît un meilleur terme.

Jaina regarda le minuteur pendant qu’Harris se pavanait. Il lui restait sept minutes et demie pour se débarrasser d’Harris et de Salkeli et désamorcer la bombe. Même pour une Jedi, ça paraissait un peu beaucoup !

 

Leia regarda avec intérêt les prêtres p’w’ecks danser d’un mouvement fluide et ondulant. Son cercle achevé, Keeramak s’adressa au ciel, les bras en croix comme pour embrasser l’univers.

— « Les océans de l’espace se sont séparés pour créer cette île de splendeur », traduisit C3PO. « Même dans le vide spatial, des oasis existent. Nous vous invitons à partager celle-ci avec nous dans l’esprit de l’unité galactique : un esprit, un corps, une âme, un… » Ce terme m’échappe, j’en ai peur…

— Rappelle-moi pourquoi nous devions absolument venir, dit Yan.

Leia lui fit signe de se taire.

— « Les étoiles brillent avec bienveillance sur ce monde », dit le Keeramak, « car c’est un lieu béni. »

Leia avait des doutes. Bakura avait connu beaucoup de problèmes, et la bénédiction d’un reptiloïde étranger n’y changerait rien. Si les Yuuzhan Vong arrivaient, il faudrait davantage que des gestes rituels et quelques tintements de clochettes pour les éloigner…

Quoi que... se dit-elle.

Si les P’w’ecks étaient d’aussi bons guerriers que les Ssi-ruuk, ils donneraient peut-être du fil à retordre aux Yuuzhan Vong. Mis au pied du mur, les Ssi-ruuk se battaient vaillamment… La crainte de mourir loin d’un monde consacré leur inspirait une rage frénétique dans les combats hors de l’Imperium. Voilà probablement pourquoi ils se distinguaient dans les attaques éclairs.

Pourtant, un malaise, d’abord diffus, grandit en Leia, à mesure que la cérémonie progressait. Le chant s’était accéléré, au point que C3PO avait du mal à continuer à traduire.

La foule se taisait. Même Yan abandonna son détachement affecté… Comme fasciné, il se pencha en avant.

— « … resserrer les liens… glorieuse synergie… même si l’espace nous sépare… unis dans la crèche des étoiles… »

Soudain, un sentiment d’urgence envahit Leia, qui en identifia la source : la Force – extérieure à elle.

— Yan…, murmura-t-elle. (Puis plus fort, pour couvrir le chant des P’w’ecks :) C’est Jaina !

— Où ? demanda-t-il. Je ne la vois pas !

— Elle m’appelle à travers la Force ! Elle a des problèmes, mais elle se concentre sur nous. Elle veut nous avertir… Quelque chose va arriver…

— Quoi ?

Leia ferma les yeux pour mieux déchiffrer les impressions qu’elle recevait.

— Yan, nous devons partir ! Vite !

Solo bondit sur ses pieds sans discuter. Cakhmain et Meewahl sur les talons, il entraîna Leia loin des tribunes d’honneur. Personne ne leur prêta attention. Le public semblait fasciné par le spectacle.

Leia était de plus en plus nerveuse.

— Que se passe-t-il ? demanda Yan. Où est Jaina ?

— Tout près. Mais je ne veux pas la distraire. Elle…

Soudain, une image parfaite se forma dans son esprit : des explosifs, et un minuteur approchant rapidement du zéro…

— Oh ! Il faut nous abriter ! Fuyez vite ! cria Leia à la cantonade.

Personne ne l’écouta.

Les gardes noghris poussèrent Yan, Leia et C3PO vers la sortie du stade.

— Couchez-vous !

Ses gardes plaquèrent la princesse au sol, leurs yeux de reptile sondant la foule autour d’eux. Le chant des prêtres avait atteint son crescendo.

Leia reçut une autre image de Jaina, si claire qu’elle forma des mots dans son esprit.

Tahiri, non !

Le monde explosa, et sa connexion avec Jaina fut coupée.

 

La barge s’arrêta à l’abri d’une dune de glace géante. Le bourdonnement des répulseurs mourut, et le véhicule se posa. Les mains de Fel couraient sur les commandes, exécutant un atterrissage impeccable.

Quand le silence se fit, il regarda Luke…

Etes-vous sûr de vous ?

Luke faisant un signe affirmatif, il coupa les moteurs.

— Nous aurons besoin de combinaisons environnementales, dit Syal.

— Non, répondit Fel. Nous ne serons pas dehors assez longtemps. Une minute ou deux devraient suffire.

Danni jeta un regard noir aux dix véhicules ronds qui volaient autour de la barge.

— En voilà un…

Un snowspeeder se posa à côté de la barge.

Saba regarda l’étrange engin atterrir. Ses moteurs brillaient dans le spectre de l’infrarouge. Quatre fins supports sortirent dans la neige pour soutenir le disque vertical. Une écoutille latérale s’ouvrit et une pilote en combinaison noire en émergea. Grande et mince – comme tous les Chiss que Saba avait vus jusque-là –, elle gagna la barge, grimpant agilement à bord. Un deuxième pilote la rejoignit. Il tenait un des étranges fusils que les Chiss appelaient des chanics.

La première pilote enleva son casque, révélant un visage à la peau bleue taillé à coups de serpe, et des cheveux très courts.

— Ganet…, dit Fel. J’aurais dû m’en douter.

— Qui est-ce ? demanda Luke.

— Elle commande la phalange d’un administrateur rival, qui n’approuve pas les changements que j’encourage. Et elle ne vous approuverait pas non plus !

Skywalker sourit.

— Voyons si nous la ferons changer d’avis…

Fel enfila une paire de gants noirs.

— Tout est prêt, Syal ?

— Oui.

Elle appuya sur un bouton, et un compte à rebours s’afficha sur l’écran de commande.

Deux minutes… Une minute cinquante-neuf secondes… Une minute cinquante-huit secondes…

Dès que l’écoutille principale de la barge s’ouvrit, l’air tiède fut remplacé par une atmosphère glaciale. Saba serra les dents. Comme pour la plupart des espèces sauriennes, le froid l’engourdissait. Elle puisa dans la Force pour lutter contre ses effets.

Soontir Fel sortit le premier, irradiant le calme et la confiance en lui. Skywalker le suivit, puis Saba, Mara et Stalgis.

Danni et Syal restèrent à l’intérieur.

Une minute quarante-cinq secondes…

Fel s’arrêta devant la pilote, qu’il toisa avec mépris.

— Je ne vous croyais pas du genre à vous adonner à la rébellion ouverte.

— Pour ma part, je préfère le terme suppression.

— Si c’est ainsi que vous justifiez vos actes…

— Je ne suis pas là pour bavarder avec vous, Fel. Je veux votre coopération. Et je l’obtiendrai, car nous tenons votre fille.

Saba vit Fel se raidir.

— Et qui est ce « nous », Ganet ?

— Peu importe. (Elle mit Fel en joue.) Tout ce qui compte, c’est que nous l’avons, non ?

— Dites-moi au moins pourquoi. J’ai fait tout mon possible pour les Chiss depuis que je…

— Vous avez rejoint Thrawn, Fel. Pas les Chiss. Nous avons nos traditions, et il les a rejetées.

— Une de ces traditions n’interdit-elle pas de tirer sur un ennemi avant qu’il ait ouvert le feu le premier ?

Ganet eut un sourire glacial.

— Vous n’êtes pas mon ennemi, Fel. Juste un inconvénient dont je me débarrasserai bientôt.

Une minute…

— Et nous ? demanda Skywalker.

— Vous êtes ici sous un prétexte que notre flotte n’a pas gobé. Zonama Sekot est une légende qui vous sert de couverture… C’est évident !

— Vous voulez donc nous éliminer aussi.

— Ça a toujours été notre intention, Jedi ! Pas question de vous laisser repartir !

— Alors, le délai qu’on nous a donné…

— … était une ruse pour nous permettre de vous attraper, bien entendu !

— Nous sommes de simples pions dans le jeu du chef navigateur Aabe ? fit Luke. Que lui avez-vous promis ? Le poste de Soontir, dès qu’il serait disponible ?

Trente secondes…

— Il nous a donné les moyens de régler une situation difficile, répondit Ganet. Il sera dûment récompensé, le moment venu.

— Comme vous « récompensez » Soontir en ce moment ? fit Mara. N’avez-vous donc aucune éthique ? Aucune conscience ?

— Nous connaissons le concept, admit Ganet en ajustant le charric. Mais dans une guerre, il n’a pas sa place. Et nous sommes en guerre, Mara Jade, n’en doutez pas ! Contre les Yuuzhan Vong, il y a seulement des alliés et des ennemis. Les Chiss n’ont pas besoin d’alliés. Reste donc des ennemis ! Ecartez-vous et tournez-vous.

Dix secondes…

— Ça vaut aussi pour votre femme, Fel.

Fel fit signe à Syal et à Danni de les rejoindre.

— Je vous promets une mort rapide, Fel, ajouta Ganet. Il n’y a aucun déshonneur à accepter votre sort.

— Pour les Chiss !

— En effet, dit Ganet, se méprenant sur le cri de bataille de Fel. Pour les…

Maintenant ! ordonna Luke.

Saba, Danni et Mara passèrent à l’action, imitées par Soontir Fel, une fraction de seconde avant que les canons de la barge n’ouvrent le feu.

La diversion fonctionna. Ganet et ses complices furent momentanément désorientés par l’explosion. Mais c’était suffisant. Luke activa son sabre laser et scia en deux le canon de l’arme de Ganet. Fel la fit tomber d’un bon coup de pied aux tibias. D’une poussée télékinétique, Skywalker expédia l’autre pilote sur la banquise.

— Vous m’avez entendu ? s’étonna Luke. J’ignorais que vous étiez sensible à la Force !

— Je ne le suis pas, assura Fel, mais je sais compter !

Sabre laser levé, Mara dévia le tir d’un des deux autres pilotes, et fit exploser une dune, à cent mètres de là. D’une poussée de la Force, Saba arracha son fusil au deuxième pilote, qui bascula de la barge.

Un snowspeeder attaqua. Le tir rata Saba de justesse. D’autres pilotes allaient riposter…

— Remontez les boucliers ! cria Stalgis en ramassant un charrie pour tirer sur le speeder ennemi.

— Saba, suis-moi tant que nous le pouvons encore ! lança Mara.

Saba comprit aussitôt ce qu’elle voulait dire. Il restait six snowspeeders, et la barge serait en danger, même avec les boucliers levés. S’ils voulaient avoir une chance d’arriver vivants au spatioport, il leur faudrait prendre des mesures plus offensives.

Saba courut au bord de la barge et sauta sur la banquise à la seconde où le bouclier remontait. Elle courut vers le speeder le plus proche. Ils étaient plus grands qu’il n’y paraissait, au moins deux fois plus hauts que Saba, et trois fois plus larges.

Mara prit le speeder de droite, et Saba l’autre. Les commandes différaient de celles des véhicules qu’elle connaissait, mais elles fonctionnaient selon les mêmes principes de base. Le vaisseau réagit quand elle effleura les touches : il n’y avait aucun système de sécurité.

Les supports se rétractèrent avec un bourdonnement et le vaisseau s’éleva gracieusement. Ses puissants répulseurs entrant en action, l’accélération plaqua Saba au fond du siège et lui comprima désagréablement la queue.

Le système d’armement était simple et élégant. Saba arma le canon blaster et visa un des six speeders ennemis. Le premier coup passa loin de lui. Elle ajusta le gain, s’habituant rapidement aux réactions du speeder, et visa de mieux en mieux. Sa dernière bataille aérienne au-dessus de Barab I commençait à dater, mais elle constata, ravie, qu’elle n’avait pas perdu la main.

Elle pulvérisa le stabilisateur bâbord de sa cible. Le vaisseau atteint descendit maladroitement. Saba n’attendit pas de voir si le pilote réussirait son atterrissage forcé.

Elle fonça en quête d’une nouvelle cible.

Mara avait aussi descendu un speeder, mais ça ne découragea pas les quatre restants. En formation serrée, ils abandonnèrent la barge et se concentrèrent contre Mara et Saba. Elles étaient handicapées par le manque de communication entre elles, mais la Force compensait un peu. Des instructions subtiles de Mara guidèrent Saba, qui obéit sans discuter – même quand ça allait contre ses propres instincts.

La Force lui suggérant de faire un tonneau au milieu de la formation ennemie, elle obéit, et obligea les speeders à se disperser.

Mara en choisit un et le descendit.

Attention à tes arrières, Saba !

Elle se tourna sur son siège pour voir ce qui la suivait. Mal lui en prit, car elle y récolta une crampe dans la queue… Un coup crépita près du côté tribord de son cockpit. Elle tira sur le manche à balai et la boucle qu’elle décrivit l’amena derrière le speeder qui la traquait. Le pilote essaya de la semer, mais ne fut pas assez rapide. Saba tira, trouant son cockpit.

L’appareil explosa. Des débris voltigèrent à la ronde.

Au terme d’une manœuvre brillante, Mara descendit un autre appareil. Puis elle se retrouva face au dernier speeder. Le pilote chiss ne dévia pas de sa trajectoire… Mal à l’aise, Saba savait que Mara ne reculerait pas devant un tel défi. S’ouvrant à la Force, elle tira, les yeux fermés.

Quand elle les rouvrit, le speeder endommagé descendait en spirale…

Elles firent rapidement le tour de la barge avant d’atterrir. Skywalker et ses compagnons avaient rassemblé Ina’ganet’nuruodo et ses trois pilotes, les ligotant.

La queue de Saba battit de soulagement quand elle sortit du speeder. Après l’excitation du combat, l’air paraissait encore plus froid.

— Joli vol ! lança Luke à Saba et à Mara.

Flattée, Saba rougit sous ses écailles.

— Merci.

— Le brouilleur est dans l’appareil de Ganet, ajouta Luke. Nous ne l’avons pas désactivé. Ils n’ont pas pu appeler à l’aide.

— Et maintenant, nous pourrions ? demanda Mara.

Tous se tournèrent vers Fel.

— A mon avis, il vaudrait mieux aller au spatioport, comme prévu. Tant que nous sommes isolés, nous éliminer et faire disparaître les preuves reste trop facile. Ça suffira peut-être à démontrer l’absurdité de notre inaction alors que la galaxie est en guerre… Inutile de prétendre être forts si notre structure de commandement est inadéquate.

Syal se campa devant son mari.

— Je n’ai pas envie que tu partes en guerre, mais je préfère ça à te voir trahi par notre peuple.

Fel posa une main affectueuse sur l’épaule de sa femme.

— Nous devrions récupérer les pilotes des appareils descendus, dit Luke. Nous ne pouvons pas les laisser mourir de froid ici.

— Pourquoi pas ? fit Stalgis. Nous tuer tous ne leur posait aucun problème de conscience !

Ganet le regarda, impassible.

— Eux, ce n’est pas nous, rappela Luke. Saba, perçois-tu la présence de survivants ?

— Quatre sont vivants, dont trois blessés. Je vous conduirai près d’eux.

Fel força les prisonniers à avancer.

— Dans la barge ! ordonna-t-il. Et pas de bêtises, Ganet, car je ne montrerai pas autant de compassion que le Jedi !

Avec un regard malveillant, la Chiss obéit.

— Et Wyn ? demanda Syal.

— Ne vous inquiétez pas, répondit Luke. Si je connais Jacen, il s’en est déjà occupé.

 

Jaina n’avait pas entièrement succombé au désespoir. La frustration, c’était autre chose… Par deux fois, elle avait tenté de distraire Salkeli, mais le Rodien la surveillait de trop près. Elle ne pouvait pas attaquer ouvertement. Le blaster restait pointé sur Malinza et ses compagnons.

Puis elle sentit un esprit l’effleurer dans la Force…

Tahiri était tout près !

Nerveuse à l’idée de contacter mentalement sa camarade, elle renforça pourtant sa présence dans la Force. Si Tahiri arrivait à temps…

Ne se doutant de rien, Harris sortit de sa poche le sabre laser de Jaina et l’activa.

— Il reste une chose à faire pour rendre l’histoire encore plus crédible. Si les Jedi sont vraiment nos ennemis, il faut des blessures réalistes, qu’en pensez-vous ?

Salkeli sourit quand Harris approcha de Malinza. La jeune fille recula, horrifiée. Vyram s’interposa entre le Premier ministre adjoint et sa chef.

— Si vous préférez vous y coller, je m’en fiche, fit Harris en brandissant l’arme.

Jaina ne pouvait plus attendre. C’était maintenant ou jamais.

D’une torsion des poignets, elle se débarrassa des menottes ouvertes puis, grâce à la Force, arracha le sabre laser à Harris, évita le tir de blaster de Salkeli et le renversa d’un coup de pied.

Harris dégaina son blaster. Plus rapide, Jaina dévia les décharges d’énergie avant de lui sauter dessus et de l’assommer avec la poignée de son sabre laser.

Elle se tourna vers Salkeli mais Malinza, qui le maintenait à terre, lui tordait un bras dans le dos.

— Bien joué ! lança Jaina. Tendez les mains.

Elle coupa les menottes de Malinza avec la lame de son sabre laser.

— Vous me paierez ça, sale Jedi ! cria le Rodien.

— Vous voulez qu’il la boucle ? demanda Vyram en ramassant le blaster d’Harris.

— Pas encore, répondit Jaina. On aura peut-être besoin de lui.

Elle s’aperçut que la télécommande du détonateur était détruite. Un tir de blaster l’avait fait fondre.

Salkeli suivit le regard de Jaina et éclata de rire.

— Combien de temps restait-il sur le minuteur ? demanda Jaina.

— Aucune idée, répondit Vyram.

— Vous avez perdu, Jedi ! jubila Salkeli.

— Pas encore ! grogna Jaina en l’agrippant par le menton. Où est la bombe ?

Le Rodien regarda la lame du sabre laser, tout près de son visage.

— Vous ne pouvez plus l’empêcher d’exploser. Elle est sous les tribunes d’honneur, cachée dans un pilier en ferrobéton.

— C’est fichu ! gémit Malinza. Nous sommes coincés ici !

Jaina entendit des bruits de course, dehors, et capta la présence de Tahiri. Mais la porte était trop solide…

Se rappelant un détail, elle fouilla les poches du Rodien.

Et en sortit son comlink.

— Tahiri, tu m’entends ?

— Jaina ? Nous sommes devant la porte !

— Je sais. Tu peux l’ouvrir ?

— Il me faudra une minute ou deux pour trouver le code…

— Nous n’avons pas une minute ou deux ! Ecoute bien : il y a une bombe. Trouve-la et désamorce-la.

— Où est-elle ?

Jaina lui dit ce qu’elle savait.

— Il reste combien de temps ?

— Je l’ignore, mais peu ! Le minuteur était réglé sur dix minutes… Vas-y, pendant que j’essaie de le désactiver !

— D’accord. Je laisse Goure ici, pour ouvrir la porte.

— Qui est-ce ?

— Le Ryn qui nous a aidés.

— Ne t’en fais pas pour nous. Nous sommes sans doute plus à l’abri ici que dehors. Dépêche-toi !

Tahiri fonça.

Jaina s’accroupit à côté de Salkeli.

— Il est où, votre fameux plan de fuite ? railla-t-elle. Comment désamorcer la bombe, Salkeli ?

— Pourquoi vous le dirais-je, même si je le savais ?

Jaina soupira et invoqua la Force pour le persuader.

— Une dernière fois : comment la désamorcer ?

Les yeux du Rodien se voilèrent.

— C’est impossible, à ce stade.

— Il doit y avoir un moyen !

Elle en était persuadée, le Rodien savait quelque chose… Elle accentua la pression de la Force.

— La télécommande…, avoua Salkeli. Mais elle est détruite !

Il ricana.

Jaina jura à voix basse. Il disait probablement vrai… Et ils n’avaient pas le temps de ranimer Harris…

— J’y suis presque ! lança Tahiri. Tu as l’information ?

— Je doute qu’on puisse la désactiver…

— Quoi ?

— Harris l’a bricolée pour qu’on puisse seulement la désamorcer avec la télécommande. Et elle est détruite ! J’ai déjà vu des dispositifs de ce type. Nous avons de la chance que la bombe n’ait pas explosé prématurément quand le détonateur a fondu !

— Que faire ? gémit Tahiri.

— Avertir mes parents, et leur demander d’alerter Cundertol. A condition de réagir vite, ils auront peut-être le temps d’évacuer les tribunes… Les secondes sont comptées, Tahiri, file de là !

Jaina tenta ensuite de joindre sa mère avec le comlink, mais le signal était trop faible. Elle envoya une onde de Force.

Maman ! Sortez de là. Il y a une bombe !

Elle reçut un faible écho en réponse à ses efforts. Mais Leia avait-elle compris le message ?

— Je l’ai trouvée ! annonça Tahiri. Elle est là, juste devant moi !

Jaina sursauta.

— Tahiri ! Pourquoi es-tu encore là ? Je t’ai dit de partir !

— Je vais tenter de la désamorcer.

— Non ! Donne l’alerte !

— Et si on ne peut pas évacuer tout le monde à temps ?

Jaina réprima une folle envie de hurler.

— Tu ignores comment t’y prendre !

— J’improviserai !

Jaina essaya de fusionner mentalement avec Tahiri. Elle aperçut ce que voyait sa camarade : la bombe n’était pas prévue pour être désarmée manuellement, mais elle avait un minuteur.

Il restait soixante-dix secondes.

Puis quelque chose de glacial la repoussa, et la fusion cessa.

Maman ! Tu m’entends ? Evacue tout le monde de là, vite !

Le verrou de la porte céda et le Ryn entra en trombe.

— Que se passe-t-il ?

Jaina consulta son chronomètre. Trente secondes !

— Fermez la porte ! cria-t-elle. La bombe va exploser !

La fusion mentale avec Tahiri se rétablit, faible mais perceptible.

— Je progresse, dit-elle dans le comlink. J’ai enlevé le couvercle, et…

Jaina perçut l’immense désespoir de Tahiri, qui ne savait que faire ensuite.

— Tahiri, fuis !

— Non ! Il doit y avoir un moyen !

— Il n’y en a pas ! Déguerpis !

— Je dois le faire, Jaina !

— Pour quoi ? Pour mourir, comme Anakin ?

Jaina capta la douleur de Tahiri.

— Tu n’as pas confiance en moi ?

— Tu n’as rien à me prouver ! Je t’en prie, fuis…

— Je peux le faire !

— Si nous en reparlions plus tard ?

Une entité sombre et puissante s’interposa.

— Mon-maw ! rrish hu camasami !

— Tahiri ?

— Non ! cria la jeune femme. Laisse-moi tranquille !

Hélas, sa volonté n’était pas aussi forte que celle de l’entité obscure.

— Do-ro’ik vong pratte !

La voix n’était plus celle de Tahiri. Jaina reconnut les mots.

Un cri de bataille yuuzhan vong…

— Riina ? demanda Jaina.

La voix revint au basique avec une aisance déconcertante.

— Anakin m’a tuée, et maintenant vous voulez aussi ma mort ! Je ne vous ferai pas ce plaisir ! Krel nag sh’n rrush fek !

— Riina, attends !

Trop tard !

La bombe explosa.

Jaina sentit le sol trembler. Les lumières s’éteignirent…

Quand les choses se calmèrent, Jaina essaya de recontacter l’esprit de Tahiri. En vain.

Son amie avait disparu.

 

Jacen percevait la peur de Wyn qu’il suivait, avec son escorte chiss, le long des tunnels de glace. Ils remontaient vers la surface gelée de Csilla. Pourtant, ses craintes n’avaient pas de raison d’être. Elle n’appréciait pas le chef navigateur Aabe, mais il n’avait rien fait de menaçant.

Espérons que ça ne change pas, pensa Jacen.

— Je ne comprends pas, dit Irolia, derrière lui. Pourquoi Aabe kidnapperait-il la fille de l’administrateur adjoint Fel ?

— Je l’ignore. Mais il l’a emmenée, et nous devons l’arrêter avant qu’un malheur arrive à la jeune fille.

— Comment savoir si vous me dites la vérité ? demanda la Chiss. Nous n’avons pas la Force, comme vous…

Jacen lui fit signe de se taire. Il n’avait pas le temps de polémiquer avec elle, s’il ne voulait pas perdre la trace de Wyn.

Se concentrant, il sentit la bulle de chaleur où se trouvaient Aabe, deux gardes et la fille cadette de Soontir Fel.

— Ils se dirigent vers le terminus du chemin de glace, dit Irolia.

— Et c’est… ?

— Une station souterraine de transport. Il y a des tunnels. Des wagons les traversent.

— Alors, il faut les arrêter avant qu’ils y arrivent ! dit Jacen.

— Oui, car s’ils montent dans un wagon, ils peuvent se retrouver de l’autre côté de la planète en une heure !

Son scepticisme envolé, la Chiss semblait déterminée à récupérer Wyn en bon état.

Il se sentit désolé pour la Chiss. Etait-ce sa faute si un officier supérieur l’avait trahie ? Il comprenait son désir de régler le problème avant que les autres soient avertis de son « erreur ».

Jacen se demandait comment se dissimuler quand il approcherait assez d’Aabe…

— Allons-y. Il faut les rattraper. A la course !

— Vous êtes sûr d’y arriver ? Avec ce type de température, courir peut être plus épuisant qu’on ne pense.

— Courez aussi vite que moi ! Au diable le reste !

S’aidant de la Force, Jacen se concentra. Il ignorait ce qu’il ferait quand il rattraperait Aabe. Mais peu importait, pour le moment…

Irolia régla ses foulées sur les siennes – au prix d’un gros effort. A la jonction suivante, elle haletait…

— Vous pouvez continuer ? murmura Jacen à Irolia.

— Oui. Je suis en parfaite forme physique, affirma-t-elle en essuyant la sueur de son front. Je pourrais franchir trois fois cette distance… et me battre à l’arrivée !

— Excellent, approuva Jacen. C’est sans doute ce qui nous attend… Ces wagons sont loin ?

— A deux jonctions d’ici.

— Alors, ne perdons pas de temps. Vous êtes sûre d’y arriver ?

— Courez aussi vite que moi ! Au diable le reste !

Jacen sourit de la plaisanterie d’Irolia, puis se concentra de nouveau.

Cette fois, il redoubla de prudence, car ils se rapprochaient. Il ignorait si le son portait loin dans les tunnels de glace, et s’ils pourraient traverser le champ délimitant la bulle… Il lui faudrait peut-être attendre que Aabe et Wyn atteignent le terminus et sortent du champ…

Quand Jacen approcha, il entendit un faible sifflement, un filet de voix trop ténu pour qu’il comprenne les mots… Mais Wyn commençait à se poser des questions sur les intentions d’Aabe.

L’homme marmonna une réponse indistincte.

Ils traversèrent les deux jonctions. Jacen et Irolia restèrent près de la bulle, juste à la limite de la zone qu’elle éclairait. Puis le Jedi sortit son sabre laser de son fourreau et posa un pouce sur le bouton d’activation.

La bulle se dissipa quand Aabe, les gardes et Wyn quittèrent le tunnel. Le terminus était plus petit que Jacen ne l’avait imaginé. Il remarqua une série de panneaux coulissants dans le mur du fond – probablement les sas menant aux wagons.

Jacen et Irolia regardèrent la petite troupe se diriger vers une des portes coulissantes. A ce moment, Wyn prit la parole.

— Je voudrais parler à mon père, dit-elle en reculant. Je veux savoir où il m’envoie.

— Un peu tard pour poser la question, vous ne croyez pas ? ricana Aabe.

— Vous m’avez menti !

Wyn recula d’un autre pas.

Aabe avança pour lui couper le chemin.

— Pourquoi vous aurais-je menti, petite ? Je suis le serviteur dévoué de votre père. Il me fait confiance.

— Confiance ? répéta Wyn, effrayée mais déterminée. Mon père n’avait même pas entendu parler de vous avant votre arrivée aux frontières de l’espace chiss, pour demander l’asile ! Il pense que vous êtes un déserteur !

Jacen vit Aabe se raidir.

— Vos accusations sont absurdes, jeune fille, dit-il, glacial. Faites donc attention à ce que vous dites.

— Vous niez ?

— Peu importe. Vous me suivrez, que vous le vouliez ou non. Plus un mot sur votre père ! C’est un homme fini. La Flotte Chiss a mieux à faire que s’occuper de voisins incapables de se débrouiller seuls. Plus vite vous serez « écartés », tous les deux, et mieux ça vaudra !

Wyn recula encore… et se retrouva dans les bras d’un garde.

Aabe dégaina son blaster.

Jacen en avait assez entendu. Il n’avait plus de doutes sur les véritables intentions d’Aabe.

— Il vaudrait mieux que vous baissiez votre arme ! lança-t-il, son sabre laser activé.

Aabe se retourna, en garde. Puis il vit Irolia.

— Que signifie ? J’exige une explication !

— Bizarre, j’allais dire la même chose ! ironisa Irolia en dégainant son blaster.

— Je n’ai pas à vous rendre de comptes ! rugit Aabe. Je suis votre supérieur ! Et je vous ordonne de retourner à vos devoirs !

— Mon devoir d’officier est d’assurer la sécurité dans le territoire des Chiss. Comme vous le savez, cette directive prime sur toutes les autres. Donc, si vous voulez bien lâcher votre arme, monsieur…

— Imbécile !

Jacen sentit la Force l’investir une seconde avant qu’Aabe ne tire. De la lame de son sabre laser, il intercepta le rayon d’énergie du blaster.

L’instant suivant, Irolia fit feu, et il dévia également le tir.

— Que faites-vous ? cracha Irolia.

Jacen n’avait pas le temps de lui expliquer qu’il était inutile de tuer quelqu’un.

Aabe recula lentement. Les gardes étaient figés par l’indécision.

— Lâches ! leur cria-t-il. Descendez-le ! C’est un gamin !

Les soldats s’éloignèrent d’Aabe, puis posèrent leurs armes sur la banquise dès qu’Irolia leur fit signe de se rendre. Ils avaient sans doute suivi les ordres d’Aabe sans faire partie du complot.

Aabe se rua sur Wyn et la poussa vers Jacen avant de foncer vers un wagon – sa seule chance de fuir.

Sabre laser levé, Jacen avança de trois pas.

D’une poussée de la Force, il ferma le wagon. Aabe s’écrasa contre la porte qui venait de lui claquer au nez et s’effondra sur le sol gelé, lâchant son blaster.

Wyn ramassa l’arme et la pointa sur lui.

— Vous ne pouvez pas fuir ! dit Jacen.

Il vit Wyn le regarder, soufflée, tandis qu’il défiait l’homme du regard. Aabe parut sur le point de se rebeller, puis il capitula avec un soupir.

Content que la crise soit terminée, et que personne n’ait été blessé, Jacen recula.

Il activa son comlink, qui bipa aussitôt. C’était son oncle.

— Jacen ? Tout va bien ?

— Maintenant, oui…

— Et Wyn ?

— Elle va bien aussi. Je te donnerai les détails plus tard.

— Bien joué. Tu as désamorcé une situation potentiellement explosive.

— Merci, oncle Luke.

Il désactiva son sabre laser et le remit à sa ceinture. Irolia appelait déjà de l’aide dans un communicateur mural.

— Comment ça va pour vous ?

— Tout est sous contrôle. D’après Tekli, quelqu’un a essayé en vain d’entrer par effraction dans l’Ombre de Jade, puis est reparti. La Sécurité enquête. On dirait qu’on s’en tire bien, non ?

Jacen regarda les gardes relever Aabe. Il hocha la tête, satisfait. Une tentative ratée de les éliminer leur vaudrait certainement un soutien plus ferme des Chiss – et de Fel. Les véritables chefs de la conspiration se tiendraient tranquilles un bon moment, de peur des représailles des Chiss loyaux au gouvernement actuel, comme Irolia, ou de l’Alliance Galactique, qui n’apprécierait pas qu’on s’attaque à ses diplomates.

Et ils verraient peut-être leur délai prolongé.

— Quand pensez-vous revenir, oncle Luke ? demanda Jacen.

— Dans moins d’une heure, pour reprendre les recherches au plus vite. Et n’imagine surtout pas que ce qui vient d’arriver n’a aucune d’importance. Les plus petites actions peuvent avoir d’énormes conséquences. Notre travail d’aujourd’hui aura peut-être des effets imprévisibles.

— Je sais, oncle Luke. A tout à l’heure.

— Sois prudent, Jacen.

— Toi aussi.

Jacen éteignit le comlink et le remit à sa ceinture en réfléchissant. Comment prévoir les conséquences des événements de la journée ? Avoir sauvé Wyn lui permettrait peut-être de réaliser son souhait – visiter Coruscant… Et un jour, elle suivrait sans doute le même chemin que son frère, quittant l’espace Chiss pour rejoindre l’Alliance Galactique.

Que deviendrez-vous, Wyn Fel ? se demanda Jacen.

Seul le temps le dirait. Et en tout cas, il aurait au moins permis à la jeune fille d’avoir une chance de réaliser son potentiel…

Il se força à revenir au présent. Wyn tenait toujours le blaster, et sa main tremblait.

— Ça va ?

— Un peu secouée, c’est tout… Merci d’avoir volé à mon secours. Vous avez été extraordinaire !

Il se sentit rougir. Mais il y avait encore tant à faire ! Retrouver Zonama Sekot comptait plus que tout.

Le reste attendrait.

— Je suis ravi de vous avoir été utile… (Il sourit pour cacher son embarras.) La vie d’un Jedi n’est jamais monotone !

 

Maman ? Maman !

Jaina cherchait sa mère parmi les blessés et les mourants. Par bonheur, elle localisa ses parents alors qu’ils s’efforçaient de se frayer un chemin dans la foule meurtrie.

Elle s’assit. Comme Harris l’avait prévu, la salle était pleine de poussière, mais intacte. Malinza, Vyram et Goure se relevèrent, toussant à fendre l’âme. Roulé en boule dans un coin, Salkeli souriait, ravi que la bombe ait explosé en dépit de tous leurs efforts.

Harris était toujours évanoui.

Jaina ramassa le comlink et l’activa.

— Maman ? Tu m’entends ?

— Oui, Jaina, répondit Leia après un moment. Tu vas bien ?

— Oui, mais Tahiri…

— Je sais. Je l’ai perçu aussi.

— Tu crois qu’elle s’en est tirée ?

— Je l’ignore, Jaina.

— Je ne me le pardonnerai jamais, si elle…

Leia l’interrompit.

— Tu n’es pas responsable.

Jaina savait que ce n’était pas vrai. Au lieu de se couper de Tahiri, si elle l’avait aidée à affronter ses problèmes…

— Que se passe-t-il dans le stade ?

— C’est le chaos. L’explosion a soufflé les tribunes du Premier ministre. La Sécurité dégage les lieux.

Jaina reçut des images venant de l’esprit de sa mère. Elle vit des visages terrorisés, des décombres, du sang… beaucoup de sang.

— Vous semblez inquiète, Jedi, dit Salkeli, sarcastique. Vous n’êtes plus si sûre de vous, maintenant !

Cette fois, Vyram ne prit pas la peine de demander l’autorisation. Il assomma le Rodien avec la crosse de son blaster.

— Et maintenant ? demanda-t-il à Jaina.

— Nous allons dans le stade pour prêter main-forte aux secouristes. Et nous préviendrons la Sécurité à propos de ces deux-là !

— Je m’en charge, dit Malinza.

— Et moi, je surveillerai nos prisonniers, proposa Vyram.

— D’accord, répondit Jaina.

— Un moment ! fit Goure. Où allez-vous ?

— Chercher Tahiri…

— Je viens aussi, annonça le Ryn, déterminé.

Ils partirent, suivant le même chemin que Tahiri.

Minute après minute, Jaina tint Leia informée de leur avance. Plus ils approchaient du site de l’explosion, plus les dégâts devenaient terribles… Des plafonds effondrés, du ferrobéton fendu, des étais tordus… et il y avait de la poussière partout.

— Par là, je crois, dit Jaina, se remémorant les vagues impressions qu’elle avait captées chez Tahiri.

Tout semblait si différent, quand les couloirs étaient intacts et propres !

Les cris des blessés devenaient de plus en plus oppressants.

Au centre de la zone dévastée, il subsistait un espace dégagé. L’explosion avait tout détruit autour, sauf dans un rayon de deux mètres. Au milieu, Tahiti était couchée en position fœtale sur le sol, comme une enfant victime d’un cauchemar.

Jaina essaya de l’atteindre dans la Force.

En vain.

— Que s’est-il passé ? demanda Goure.

— Elle a dû se protéger avec une bulle de Force qui a dévié le gros de l’explosion.

Elle tendit la main, cherchant la bulle. Mais ne sentit rien.

— La bulle se sera dissipée quand elle s’est évanouie, fit Jaina, surprise.

Goure retourna la jeune femme sur le dos. Elle se laissa faire comme une poupée de chiffons, inerte, les yeux grands ouverts.

— Tahiri ?

Pas de réponse.

Il posa une main sur sa gorge.

— Elle est vivante.

Jaina essaya de nouveau de la percevoir, mais il n’y avait rien. Elle n’avait jamais senti quelqu’un de si vide avant, excepté…

Elle est pratiquement invisible dans la Force… Comme les Yuuzhan Vong !

— Jaina ? fit Leia dans le comlink.

— Oui ?

— Les équipes de secours déblaient les décombres.

Levant la tête, Jaina vit des mouvements au-dessus, à travers le trou du plafond.

— Nous sommes juste au-dessous. Tu es avec eux ?

— Oui. Ils ont commencé à sortir des corps.

Jaina sentit le remords l’envahir. Si elle avait agi plus vite…

— Combien ?

— Quatre pour le moment. Et…

— Oui ?

Jaina sentit que sa mère avait une mauvaise nouvelle à lui annoncer.

— Le Premier ministre Cundertol est mort.

Jaina regarda Tahiri, sans répondre.

— Jaina ? Tu m’as entendue ?

— Oui, maman. J’arrive.

Goure souleva Tahiri dans ses bras et suivit Jaina.

Les paroles de Malinza lui revinrent à l’esprit.

Un bon travail amène un mauvais résultat pour quelqu’un…

Jaina avait agi au mieux… et tout était allé de travers. Salkeli l’avait trahie, Zel et Jjorg étaient morts et Tahiri inconsciente. Enfin, le Premier ministre de Bakura avait été assassiné…

Que d’échecs accumulés…

Mais Jaina n’était pas la seule ! Son oncle Luke avait libéré les Bakuriens du joug de l’Empire, et ils avaient tourné le dos à l’Alliance Galactique. La Nouvelle République avait fondé la Flotte Bakurienne pour protéger la planète des Ssi-ruuk… Une flotte décimée dans une région lointaine de la galaxie… laissant Bakura de nouveau vulnérable.

Bakura n’avait agressé personne, et pourtant le malheur s’acharnait. Pas étonnant que les Bakuriens cherchent des solutions de remplacement…

Et si le traité avec les P’w’ecks était signé ? se demanda Jaina. Même si ses nouveaux alliés étaient sincères, quelles calamités risquaient encore de s’abattre sur la planète ?

Dans le stade, un attroupement horrifié entourait le Premier ministre, étendu sur une civière à répulseur, ses robes déchirées au milieu… Un médic avait vainement tenté de le ranimer.

Leia leva la tête quand Jaina arriva. Elle était pâle, et ses yeux débordaient de larmes.

 

Les communications étaient brouillées, mais le sentiment de désastre semblait bien trop évident au goût de Jag… Les rares sources d’informations étaient unanimes : une bombe avait explosé pendant la cérémonie de consécration. Par chance, d’après les commentateurs, « quelque chose » avait étouffé la détonation et les dégâts étaient moins graves qu’on aurait pu le redouter.

Malgré tout, on déplorait la mort de deux sénateurs, de quelques gardes et invités d’honneur. Il y avait quarante blessés.

Cundertol aussi avait péri.

— Ktah ! cracha Jag.

Les Chiss exprimaient rarement leurs émotions, mais les mots idoines existaient dans leur langue. L’assassinat ? Une stratégie hideuse ! Et si l’attentat avait été fomenté par des terroristes, la répression serait rapide et brutale.

Pourtant, d’après certaines rumeurs, il ne s’agissait pas de terroristes, mais d’un complot du Premier ministre adjoint en personne…

Voir réapparaître Jaina avait apporté un peu de réconfort à Jag, mais elle avait confirmé ses pires craintes… L’auteur de l’attentat était Blaine Harris, qui espérait faire accuser l’Alliance Galactique, transformer Malinza en martyre et se débarrasser de Cundertol dans la foulée…

Cundertol mort et Harris arrêté, Bakura se trouvait privée de ses deux chefs.

Le Sélonia diffusa un message.

— Nous recevons à l’instant une notification du Sentinelle, dit Mayn. Le général Panib a instauré la loi martiale. Il demande que nous n’entreprenions rien, quoi qu’il advienne. Il ignore encore comment le Keeramak réagira, mais nous relevons des signes d’activités sur le spatioport de Salis D’aar, où les vaisseaux p’w’ecks sont stationnés. A mon sens, les extraterrestres ne resteront pas assis sur leur queue pendant que des bombes explosent autour de leur chef !

Jag était du même avis. L’heure de la cérémonie n’avait pas été précisée. Les P’w’ecks et le Keeramak pouvaient partir et recommencer par la suite…

— Que voulez-vous que nous fassions, Mayn ? demanda Jag.

— Reculez un peu. C’est un moment délicat. Quoi que soit cette « garde d’honneur », pour l’instant, tenons-nous à distance.

— Compris.

Il transmit l’ordre à ses pilotes et changea son vecteur pour s’éloigner de l’escorte du Keeramak. Il avait très envie d’atterrir – surtout pour revoir Jaina.

 

Une fois Tahiri couchée sur une civière à répulseur, Goure proposa son aide aux équipes de secours. A la vue du Ryn, Yan leva un sourcil, mais il était trop ravi de ce soutien inattendu pour poser des questions. Afin de dégager deux victimes coincées sous les décombres, on avait mobilisé des traîneaux à répulsion improvisés. Jaina fouillait les gravats avec la Force pour trouver les points de moindre résistance, et renforcer l’énergie vitale des victimes qu’on ne pouvait pas soigner immédiatement.

Les gardes p’w’ecks avaient resserré les rangs autour du Keeramak. Le mutant ssi-ruuvi aux écailles multicolores observait le carnage, une expression indéchiffrable sur ses traits de saurien.

Quand des secours médicaux supplémentaires arrivèrent enfin, Jaina marqua une pause. Tout le monde était couvert de poussière et éclaboussé de sang. Les survivants semblaient encore sous le choc – même ceux qui aidaient à dégager les autres. Unis par la tragédie, les sénateurs et les gardes travaillaient main dans la main. Personne ne prêtait attention à l’orage qui couvait, tant il paraissait absurde, en comparaison.

Pourtant, quelque chose dérangea Jaina, un son presque subliminal, un gémissement étrange et obsédant…

Yan leva la tête, sourcils froncés.

— Tu entends ça, Leia ?

La princesse se retourna, sidérée.

— Ils ont recommencé !

Jaina suivit son regard au centre du stade. La cérémonie avait effectivement repris ! Des reptiloïdes gracieux dansaient en cercle, et une silhouette multicolore psalmodiait des sons rauques et incompréhensibles.

— Que se passe-t-il ? demanda-t-elle.

— Ils veulent finir le boulot, dit Yan. Ces lézards ont de la suite dans les idées ! On en viendrait presque à les admirer…

Les admirer ? pensa Jaina. Pas question ! Ces êtres n’ont pas la moindre compassion !

— Je ne comprends pas, dit-elle. Pourquoi le Keeramak voudrait-il à tout prix finir la cérémonie maintenant, alors qu’il serait plus prudent de l’ajourner ?

— Ce sont des extraterrestres, répondit un médic, à côté d’eux. Qui peut dire ce qui se passe dans leurs têtes ?

— C3PO, demanda Leia, traduis.

Le droïd de protocole cessa de soulever des morceaux de ferrobéton et inclina la tête, à l’écoute.

— « Les golfes de l’espace ne sont pas notre demeure, ni les mondes arides. Les mondes de feu et ceux de glace ne sont pas notre demeure. Là où l’oxygène brûle et où l’eau coule, là où le carbone forme des chaînes et où l’ozone protège le sol, nous planterons nos racines. La semence de notre espèce est fertile. Elle a seulement besoin d’un terreau adéquat. »

— Toujours le même discours, fit Yan. Mais je ne m’explique pas leur hâte à finir la cérémonie en dépit de tout !

Jaina se souvint des remarques d’Harris à propos des similitudes entre les Ssi-ruuk et les Yuuzhan Vong… Les guerriers vong ne seraient jamais partis livrer combat sans un sacrifice propitiatoire à Yun-Yammka au préalable. Les Ssi-ruuk ne voulaient pas risquer leurs âmes en mourant sur un monde non consacré… Peut-être désiraient-ils conclure la cérémonie au plus vite, au cas où d’autres attentats auraient lieu ?

Mais la logique de ces notions échappait à la jeune Jedi. La Force englobait tout, n’exigeant ni sacrifices ni respect d’un lieu déterminé…

Jaina repensa aux paroles de Malinza sur l’équilibre cosmique. Il fallait qu’elle informe ses parents du sort de la jeune activiste. D’ailleurs, quel était le rôle de Goure dans tout ça ? Que ferait le gouvernement bakurien quand les choses seraient rentrées dans l’ordre ? Remettre Malinza Thanas en prison ? Ou Jaina, pour l’avoir aidée à s’échapper ?

Et qu’adviendrait-il de Tahiri ?

Un bon travail amène un mauvais résultat…

Le lavage de cerveau subi par Tahiri avait été un drame terrible. Mais son sauvetage avait rétabli l’équilibre. Elle avait eu l’amour d’Anakin, avant que la mort ne l’en prive… Où en était-elle, à présent ? La réémergence de « Riina Kwaad » ajouterait sûrement de l’huile sur le feu. Si l’Equilibre existait vraiment dans l’univers, quand compenserait-il les malheurs de Tahiri ?

Un bourdonnement interrompit le cours des pensées de Jaina. Levant la tête, elle vit trois vaisseaux p’w’ecks de transport de troupe, de classe D’kee. Ils descendirent vers le stade. Le drapeau du toit se déchira quand un vaisseau atterrit dessus.

— Des renforts ? demanda Yan à la cantonade.

La foule s’agitait… Les porteurs de bannières anti-p’w’ecks avaient envahi l’espace central. Si les P’w’ecks étaient bien armés, ils savaient sûrement que la foule risquait de devenir agressive et de les déborder.

— Un moyen rapide de fuir, peut-être, répondit Jaina. Ils voulaient consacrer la planète en dépit de tout, mais pas y rester une fois la cérémonie terminée.

— Tu as peut-être raison, chérie, dit Yan.

Des sentiments conflictuels envahirent Jaina… Son père avait vieilli. Pourtant, dès que les choses tournaient mal, il semblait rajeunir. Il détestait les entretiens diplomatiques, mais il était à son affaire quand il s’agissait de jouer des poings.

Les vaisseaux d’étrangers se posèrent à bonne distance du cercle P’w’eck, forçant les Bakuriens à se disperser. Assez modestes pour des vaisseaux spatiaux, les transporteurs de classe D’kee faisaient quand même quatre bons étages de haut.

— Excusez-moi, maîtresse…, dit C3PO.

— Regardez ! cria Yan. Trois autres !

— Que font-ils ? demanda Leia, angoissée.

— Si je peux me permettre de vous interrompre, Maîtresse…, insista C3PO.

Le vacarme était tel qu’il étouffait les paroles du droïd.

Les moteurs coupés, le bruit diminua. Les chants cessèrent aussi. Les écailles du Keeramak scintillaient comme une armure arc-en-ciel.

Dans le calme relatif, Jaina se pencha vers C3PO.

— Qu’essayais-tu de dire ?

— La cérémonie est terminée, maîtresse.

— Merci, Bâton d’Or ! ironisa Yan.

— Mais le rituel exigeait que le Keeramak donne un nouveau nom à la planète : Xwhee.

Leia se tourna vers lui.

— A-t-il mentionné ce « détail » aux Bakuriens ?

— J’en doute fort, maîtresse. Il se trouve que le Keeramak a aussi dédié Xwhee à l’Imperium ssi-ruuvi.

Yan et Jaina se tournèrent vers C3PO. Comme en réponse aux paroles du droïd, un coup de tonnerre éclata, et de grosses gouttes de pluie commencèrent à tomber sur son crâne métallique, transformant la poussière qui s’y était accumulée en boue rougeâtre.

— C3PO, tu es sûr ? demanda Leia.

— Tout à fait. Il l’a même annoncé à plusieurs reprises lors de la cérémonie. Il a parlé du « glorieux Imperium ssi-ruuvi », du « majestueux Imperium ssi-ruuvi », de l’« incomparable Imperium ssi-ruuvi »…

Yan se tourna vers Leia.

— Ça ne pourrait pas faire partie de la cérémonie ? Etre un vestige de leurs anciennes coutumes ? Comme nous qui parlons toujours de la Nouvelle République et pas de l’Alliance Galactique… ? Leur nouvel Imperium ssi-ruuvi n’a peut-être rien à voir avec l’ancien…

— J’en doute, fit Leia. Regarde leurs navires.

Un pan des vaisseaux de transport s’ouvrit et des rampes en sortirent. Malgré la pluie, Jaina essaya de sonder l’intérieur.

La peinture marron se dissolvait sous la pluie, et les écailles dorées apparurent – la caste des prêtres ssi-ruuvi.

Percés à jour par la volonté des instances célestes, les prêtres adoptèrent une posture droite et fière, que Jaina se rappelait avoir vue sur des holos.

Puis elle comprit.

Bien entendu ! Le traité avec les P’w’ecks était un camouflage ! Une fois que Bakura aurait été consacrée, appartenant aux Ssi-ruuk, ils pourraient attaquer en force !

— Ça, ça ne me plaît pas du tout, commenta Yan quand des colonnes de guerriers ssi-ruuvi aux écailles rousses émergèrent du vaisseau le plus proche.

 

Jag se sentit frustré lorsque les informations cessèrent d’arriver, au moment culminant de la consécration. Il vérifia sa console pour voir si le brouillage venait d’elle.

Ce n’était pas le cas.

— Sélonia, il semble que les transmissions soient interrompues. Captez-vous quelque chose ?

— Négatif, Jumeaux Un. Nous avons aussi perdu notre liaison. Nous vérifions…

Jag attendit, anxieux.

— Des décollages ! cria un de ses pilotes.

Il sursauta. Consultant son écran, il constata que des dizaines de petits vaisseaux émergeaient d’un transporteur p’w’eck proche, l'Errinung’ka. L’ordinateur identifia les chasseurs droïds, qui composaient la moitié de la flotte. Les autres étaient d’un type inconnu hors des frontières de l’Imperium ssi-ruuvi : des appareils de classe V’sett. Si la mémoire de Jag ne le trompait pas, ils avaient deux fois la puissance de feu des chasseurs droïds ordinaires, et une maniabilité supérieure. Surtout, ils transportaient des pilotes de chair et de sang…

Il lui fallut un instant pour comprendre. L’offre de paix des P’w’ecks était bidon, et la consécration de la planète, un simple moyen de préparer le terrain à une force d’invasion ! Pas besoin d’être un génie pour comprendre que les choses allaient vite tourner à la catastrophe…

— Soleils Jumeaux, alerte rouge ! Sélonia, vous enregistrez ça ?

— Oui. Nous essayons de contacter le général Panib, mais les communications sont aussi coupées à la surface. (Des parasites remplacèrent la voix.)… brouillés ! Soyez sur…

Le signal disparut avec un crissement aigu. Jag baissa le volume. Et maintenant ? Des vaisseaux ennemis se déversaient dans l’espace environnant, et il n’y avait encore aucune réaction des forces locales.

Entre l’ennemi et lui, les vols mixtes bakuriens/p’w’ecks censés être la « garde d’honneur »… Soit plus de deux cents vaisseaux. Les Bakuriens volaient toujours en formation avec les P’w’ecks. Cela surprit Jag : un des pilotes bakuriens avait dû s’apercevoir de ce qui se passait, même si les communications étaient brouillées !

Envoyant un clic à ses ailiers, il s’aligna sur le vecteur du trio de chasseurs le plus proche, deux vaisseaux droïds flanquant une aile Y bakurienne.

Il comprit vite que « flanquer » était un euphémisme. Les émissions d’énergie indiquaient que les deux vaisseaux droïds avaient verrouillé leurs rayons tracteurs sur le Bakurien, le forçant à aller où ils l’avaient décidé.

Il calcula leur trajectoire. Dans deux tours d’orbite, elle croiserait le transporteur Firrinree. Un frisson glacé le parcourut : les chasseurs droïds étaient en train d’enlever le pilote !

C’était la même chose pour tous les autres vols de la garde d’honneur, comme le lui confirma un scan rapide. Incapables de résister aux rayons tracteurs des P’w’ecks, les pilotes bakuriens étaient inexorablement entraînés dans le piège qu’on leur avait tendu.

Impossible de prévenir Soleils Jumeaux, le Selonia ou le général Panib… Mais Jag refusait de rester les bras croisés alors que les pilotes étaient capturés – probablement pour être technitionnés.

Il espéra que chacun comprendrait… et lui prêterait main-forte.

Armant ses batteries avant, il accéléra pour intercepter les chasseurs droïds. Il tira, touchant le bouclier d’un vaisseau – plus résistant qu’il ne l’aurait cru. Un chasseur ennemi vira pour se lancer à sa poursuite. Jumeaux Six, le premier de ses ailiers, essuya une salve de laser qui l’obligea à changer de cap.

Le deuxième vaisseau droïd et le pilote qu’il avait capturé foncèrent droit devant eux, en direction du Firrinree. D’un coup d’œil à ses écrans, Jag vit que les autres chasseurs ennemis imitaient le premier. La mascarade de la « garde d’honneur » était terminée.

Jag s’aligna derrière le chasseur en fuite et l’arrosa d’une volée de rayons, le réduisant rapidement en poussière. L’aile Y libérée changea de cap aussitôt.

Jumeaux Deux élimina l’autre chasseur droïd et décrivit une boucle pour rejoindre la formation. Emettant une série de clics, l’aile Y le suivit. A la tête d’un vol en losange composé de divers vaisseaux, il visa le trio suivant de « gardes d’honneur ».

Son écran tactique fourmillait maintenant de nouvelles cibles. Les transporteurs ennemis avaient vidé leurs baies de décollage. Des centaines de chasseurs protégeaient l’approche des vaisseaux qui avaient fait des prisonniers. Une série de décollages venant du Sentinelle et du Défenseur indiqua que la Flotte Bakurienne comprenait enfin ce qui se passait.

Quand les deux forces s’affrontèrent, le ciel, autour de Bakura, devint une succursale de l’enfer…

Jag pilota comme il ne l’avait plus fait depuis longtemps, ravi d’affronter une technologie familière – même face à un ennemi supérieur en nombre. Bizarrement, il eut le sentiment d’être revenu à l’époque de l’Académie, pilotant sous la surveillance d’un instructeur… Il se félicita : le temps passé à combattre les Yuuzhan Vong n’avait pas érodé ses réflexes.

Pilotés par des créatures de chair et de sang, les chasseurs V’sett étaient difficiles à éliminer. Hérissés de générateurs de boucliers et de détecteurs, ils ressemblaient aux vaisseaux droïds, en plus plat et incurvé. Une coque opaque cachait les pilotes, et dès qu’un tir passait trop près, les boucliers prenaient l’aspect d’un miroir.

Jag avait appris que l’Empereur Palpatine convoitait jadis une version antérieure de ces boucliers. Pour cette raison, il avait cherché à s’allier aux Ssi-ruuk, peu avant que les Rebelles ne le battent à Endor.

Que serait-il arrivé si l’Empereur avait réalisé son rêve ? Jag préférait ne pas y penser… Avec ces boucliers, la Rébellion aurait été écrasée… De plus, les Chiss qui s’abritaient dans les Régions Inconnues n’auraient plus été en sécurité bien longtemps.

Mais ils avaient déjà combattu les chasseurs ssi-ruuvi. Et ils restaient capables de les affronter. Jag découvrit que les V’sett étaient vulnérables aux attaques multiples. Se concerter leur était difficile car les vaisseaux n’avaient pas de moyens de communication. Grâce aux attaques multiples, ils descendaient chasseur sur chasseur et forçaient les Ssi-ruuk à y réfléchir à deux fois avant de revenir à la charge…

Voyant un de ses équipiers aux prises avec un chasseur V’sett, Jag se lança à sa poursuite. Il verrouilla le V’sett sur son ordinateur de visée et tira, mais le chasseur vira à gauche.

Jag se recadra sur le cap de ses ennemis. Avant qu’il puisse de nouveau ouvrir le feu, deux chasseurs foncèrent sur lui du côté bâbord, tirant à tout-va.

Il piqua pour échapper au feu.

Quand il put rechercher l’aile X, quelques instants plus tard, il la vit exploser sous le tir croisé des lasers des V’sett.

Les deux chasseurs qu’il venait de semer se lancèrent à sa poursuite. Se battant de leur côté, ses équipiers ne pourraient pas venir à son aide. Il lui faudrait se débrouiller seul…

 

Yan chercha du regard la sortie la plus proche. Dans le stade, des cris de panique éclatèrent. Les gardes ouvrirent le feu sur les guerriers ssi-ruuvi, qui ripostèrent par un tir nourri de leurs disques-mort. Progressant par bonds puissants, les Ssi-ruuk repoussèrent rapidement les Bakuriens. Les gardes qui avaient protégé le Keeramak étaient bien des P’w’ecks, pas des Ssi-ruuk déguisés. Armes brandies, ils s’étaient regroupés autour de leur chef.

— Une retraite serait peut-être de mise ! lança Jaina à ses parents. Maintenant que Bakura a été consacrée, ces gars-là n’auront plus peur de se battre…

— Si nous arrivons au Faucon, répondit Leia, ses gardes noghris sur les talons, nous aurons de meilleures chances de réagir !

— Le Sélonia est-il au courant ? demanda Yan.

— Tout est brouillé, répondit Leia.

Jaina repensa à Jag, espérant qu’il n’avait pas de problème. Impossible de dire ce qui se passait en orbite… Si on y livrait aussi un combat… Elle aurait voulu être aux commandes de son aile X, et s’occuper de l’ennemi dans son rectangle de visée ! Lors des affrontements entre pilotes de chasse, les choses étaient tellement plus simples !

Mais si Jaina voulait tirer sa famille de là, l’heure était à l’action, pas aux regrets. Elle se tourna vers Goure et la civière de Tahiri.

— Comment sortir d’ici ? demanda-t-elle.

— Les entrées principales sont sûrement bloquées ! cria Goure, pour couvrir le roulement du tonnerre.

Jaina regarda autour d’elle. L’averse gênait la visibilité. Qu’arrivait-il au centre du stade ? Les disques-mort crépitaient, emplissant l’air d’un réseau d’énergie mortelle.

— Sans risque de se tromper, on peut dire que les trois autres vaisseaux étaient destinés à nous empêcher de quitter les lieux…

— Partons par où nous sommes venus, trancha le Ryn en désignant le fossé, dans le sol des tribunes. Ce sera mieux que de rester à découvert…

Jaina était d’accord. Goure et elle calmèrent les spectateurs et les sauveteurs, leur demandant de leur faire confiance et de fuir par le fossé. Faute d’un meilleur plan, les survivants écoutèrent ce conseil. Yan et Leia suivraient, puis Goure leur passerait Tahiri, étendue sur sa civière. L’arrière-garde, Jaina et les Noghris descendraient en dernier.

— Et le Premier ministre ? lança une femme.

— Il est mort ! cria Jaina.

— Nous ne pouvons pas abandonner son corps aux lézards !

— Mais… (Jaina changea d’idée.) D’accord. Je verrai ce que je peux faire.

Elle chercha la civière où on l’avait placé. Si elle pouvait l’asservir aux répulseurs de celle de Tahiri, elle l’emmènerait. Mais il ne fallait pas que cela l’empêche de sauver des vivants !

La civière se trouvait derrière un pilier, couverte par un sac de transport de cadavre. Quand Jaina tira dessus, le sac tomba.

Il était vide.

Quelqu’un avait dû récupérer le corps, un des gardes ou un sénateur… Tant pis ! Au moins, elle n’aurait pas à traîner un cadavre derrière elle…

Jaina retourna près du cratère et jeta un dernier coup d’œil à la bataille qui se livrait dans le stade. Sous la pluie battante, de vagues silhouettes bougeaient… Les Bakuriens perdaient du terrain. Ils ne tiendraient plus longtemps. Les prisonniers seraient emmenés dans le vaisseau-mère pour être technitionnés…

Une main se posa sur son épaule, la faisant sursauter.

— Viens, Jaina. Nous ne pouvons plus rien faire, ici.

Avant de suivre son père, la Jedi regarda vers le ciel.

Que la Force soit avec toi, Jag. Où que tu sois.

 

Jag accéléra à pleine vitesse vers la lune la plus proche de Bakura. Leurs tirs zébrant l’espace, les chasseurs ennemis le traquaient.

Il fonça vers l’hémisphère nord de la lune, espérant s’y abriter. Peine perdue. La surface, lisse et ondulante, évoquait un immense flot de lave solidifiée.

Jag multipliait les embardées pour esquiver les tirs et les rayons tracteurs de l’ennemi, mais tôt ou tard, ça tournerait mal…

Il se maudit : sa manœuvre l’avait mis en plus fâcheuse posture encore !

La surface lisse de la lune se transforma en une chute d’eau pétrifiée dans un canyon d’au moins cinquante kilomètres de large sur deux de profondeur. Des rochers jaillirent des parois comme d’immenses poings écarlates. Les chasseurs V’sett suivirent leur proie dans ce décor. Ils ne la canardaient plus, sans doute décidés à la capturer. Il leur suffisait d’être patients…

Jag rasa le sol du canyon, virant pour éviter les dépôts minéraux saillants. De dix mètres de large sur au moins trente de haut, ils ressemblaient à des arbres fossilisés. Quand il en toucha un avec son bouclier, il constata qu’il importait peu de les éviter : l’« arbre » se pulvérisa, la poussière produite souillant la verrière du cockpit. Dès lors, Jag vola en droite ligne. La poussière aveuglerait peut-être ses poursuivants. Ce serait toujours ça de pris…

Le canyon se rétrécissant, Jag sut qu’il devait redresser, ou s’écraser contre une paroi. Il visa un surplomb rocheux, en hauteur. Deux doigts de pierre pointaient vers l’espace, comme tendus vers la bataille. Si Jag pouvait rebrousser chemin, ses coéquipiers voleraient à son secours.

Comprenant ses intentions, les chasseurs ouvrirent le feu. Des débris s’écrasèrent sur ses boucliers. Il tenta de passer entre les deux doigts de pierre, mais en heurta un. Perdant le contrôle de son vaisseau, il partit en tonneau.

Il sortit de la vrille un peu secoué.

Les deux V’sett revinrent sur lui.

Il dévissa latéralement pour tenter d’éviter leurs rayons tracteurs, mais l’ennemi se rapprochait.

Dans quelques secondes…

Une flèche blanche fusa devant sa verrière. Il eut à peine le temps de voir l’aile Y cracher des torpilles à protons sur les V’sett. Les pilotes ssi-ruuvi ne purent pas désactiver les rayons tracteurs avant qu’ils attirent les torpilles. Le premier vaisseau se désintégra. Le second, secoué, tomba à la surface de la lune…

… Et explosa l’instant suivant.

Les écrans arrière de la griffe étaient de nouveau dégagés, mais elle avait un moteur de poussée endommagé. L’aile Y s’aligna sur la trajectoire de Jag. La pilote – celle que Jag et ses équipiers avaient sauvée au début de la bataille – le salua en passant.

Mais la Flotte Bakurienne était en mauvais état. Victime d’un bombardement intense, le Sentinelle avait vu ses boucliers s’effondrer. Le Défenseur ne disposait pas d’assez de chasseurs pour faire une différence dans la bataille. Les forces ssi-ruuvi éliminaient à mesure tous les appareils qui décollaient…

Bakura était pratiquement sans défense !

Les deux transporteurs ennemis de classe Sh’ner trônaient au-dessus de la bataille. Leurs boucliers impénétrables avaient repoussé tous les assauts. Des vaisseaux prisonniers les entouraient. Des pilotes condamnés à la technition…

Une formation triangulaire de sept V’sett émergea de l’horizon de la lune, fonçant vers Jag et l’aile Y.

Jag tenta d’accélérer, mais sa griffe donnait déjà tout ce qu’elle avait. Sept vaisseaux ennemis contre son chasseur endommagé et une aile Y…

L’issue du combat ne faisait pas de doute.

Le brouillage se dissipa un instant. Il en profita pour vérifier où en était son escadron.

— Soleils Jumeaux, au rapport !

— Ici Trois.

— Quatre.

— Six.

— Huit. (Une brève pause.) Jag, ils me tiennent.

— Moi aussi, dit Six.

— Je ne serai pas seul…, ajouta Trois. Ils m’ont aussi.

Jag jura. A part lui, il restait un seul pilote en liberté. Et pour combien de temps ?

L’aile Y voulut échapper aux chasseurs, mais elle fut tirée en arrière par sept rayons tracteurs combinés. La pilote condamnée garda le silence radio. Son unité com était hors service… ou elle ne voulait pas accabler Jag de son désespoir.

Il se jura que l’ennemi ne l’aurait pas aussi… Plutôt se faire pulvériser que laisser les Ssi-ruuk aspirer son âme et l’injecter dans un droïd de bataille !

Mais tant qu’il restait une chance de fuir…

Jag aurait voulu hurler de frustration.

Il faillit ne pas sentir les rayons tracteurs se verrouiller sur son chasseur et le traîner inexorablement vers son destin…

 

Le long des tunnels qui couraient sous le stade, Jaina assurait l’arrière-garde de la colonne de survivants guidés par l’éclairage d’urgence.

A travers le ferrobéton qui les entourait, elle entendait encore le crépitement des disques-mort et les cris…

La civière de Tahiri près de lui, le Ryn ouvrait la marche, revenant sur ses pas rapidement mais prudemment. De l’eau coulait devant eux. Emportant dans les profondeurs la poussière et les débris, elle rendait le sol glissant et dangereux.

— Mes circuits ne supporteront pas cette humidité une minute de plus, déclara C3PO après avoir glissé pour la sixième fois.

— Cesse de rouspéter, Bâton d’Or ! grogna Yan en flanquant une claque dans le dos du droïd. Tu as connu pire, fiston ! Tu te souviens de l’affaire de l’uniforme du commando, la dernière fois qu’on était là ?

Si C3PO avait été capable de frissonner, il l’aurait fait, pensa Jaina.

— Trop bien, monsieur, j’en ai peur… Mes circuits ne me permettent pas d’oublier facilement.

Alertée par un bruit suspect, Jaina tira son sabre laser.

— Princesse Leia ! Capitaine Solo !

— Malinza ? s’exclama Jaina. Que faites-vous ici ? Vous auriez dû partir depuis longtemps.

— La sortie est bloquée. Il y a des Ssi-ruuk partout !

Blaster au poing, la jeune fille était à la tête de son petit groupe. Vyram précédait leurs prisonniers, Salkeli et Harris, tous deux attachés et bâillonnés.

Jaina se tourna vers Goure.

— Y a-t-il d’autres issues ?

— Je n’en suis pas sûr. Mais lui, il le sait peut-être, ajouta le Ryn en désignant Harris.

Jaina fit signe à Malinza d’enlever son bâillon du Premier ministre adjoint.

— Alors ?

— Alors quoi ? rugit Harris.

— Y a-t-il une autre sortie ?

— Vous voudriez le savoir, hein ? (Il éclata de rire.) Ne comptez pas sur moi !

— Au cas où ça vous aurait échappé, vos sombres machinations sont un fiasco ! Les P’w’ecks servaient de paravents aux Ssi-ruuk. D’accord, vous avez tué le Premier ministre, mais ça n’a pas arrêté la consécration. Résultat, les forces d’invasion sont là !

Harris pâlit.

— Une invasion ? murmura-t-il. Si Cundertol est mort, Bakura aura besoin d’un chef énergique. Vous n’aimez peut-être pas mes méthodes, mais elles sont efficaces. Libérez-moi, et…

— Trop tard ! lâcha Jaina. Vous risquez de ne pas survivre une heure de plus. Alors, prendre le poste du Premier ministre…

— C’est vous qui commandez maintenant ? (Il se tourna vers Malinza.) Pratique, pour l’Alliance Galactique, d’être sur place pour nous sauver d’une crise dont nous ignorions tout, hein ? A un moment où…

— Bouclez-la, Harris ! explosa Jaina. Vous n’intéressez personne. Les Ssi-ruuk sont sur Bakura, et c’est en partie votre faute. Vous auriez dû vérifier la fiabilité de vos nouveaux alliés avant de vous vendre à eux !

— Ce n’est pas lui qui s’est vendu…

Sortant des ombres du couloir, un homme de haute taille avança dans la lumière. Au début, Jaina ne le reconnut pas.

Ses cheveux blonds avaient brûlé et il était en haillons, les mains cachées par ses manches déchirées.

— Le marché des politiciens est plutôt limité, ajouta le Premier ministre Cundertol.

— Vous ? s’écria Leia, sidérée. Mais vous êtes…

— Mort ? Eh non ! L’explosion m’a seulement assommé. J’ai repris connaissance dans ces couloirs, désorienté. Puis j’ai aperçu Malinza, mais je suis resté caché… Je voulais savoir ce qui se passait vraiment, et pourquoi elle était avec Blaine. J’ai cru que Liberté l’avait enlevé, posant la bombe. Mais je me trompais à votre sujet, Malinza. Acceptez toutes mes excuses.

— Harris nous a piégés ! lança la jeune fille.

— Impossible ! cria le Premier ministre adjoint. Cette bombe était… On nous a dit que vous étiez mort !

— Une erreur. (Cundertol brandit un blaster.) Une de plus… Dire que je vous faisais confiance, Harris ! Je n’arrive pas à croire que vous êtes responsable de tous nos ennuis !

Même si le blaster visait Harris, Jaina garda son sabre laser activé. Les gardes noghris se placèrent entre Cundertol et Leia. Il y avait un problème avec le Premier ministre, mais Jaina ignorait lequel… Quand elle le sonda avec la Force pour voir s’il n’était pas en réalité un Yuuzhan Vong, elle sentit une texture étrange… Pour Jaina, sa présence ne ressemblait à rien de connu.

Goure aussi savait quelque chose, mais en présence de Cundertol, il ne pouvait rien dire.

Jusqu’à plus ample informé, Jaina décida de ne pas désactiver son sabre laser.

— Pardonnez notre surprise, Premier ministre, intervint Leia. Après tous ces événements dramatiques, nous sommes perturbés… Vous avez dû comprendre que l’offre de paix des P’w’ecks était une ruse visant à préparer l’attaque des Ssi-ruuk…

— Les lézards avaient tout prévu de longue date, j’imagine. A votre avis, comment les repousser ?

Jaina sursauta en entendant cette expression pour le moins cavalière – les lézards ! – dans la bouche du Premier ministre.

— La Flotte et le Sélonia y travaillent, répondit Leia. Mais les communications sont brouillées, et des Ssi-ruuk se sont sûrement lancés à notre poursuite. Il faut déguerpir au plus vite et rallier le Faucon.

— Bonne idée, approuva Cundertol. Blaine, vous alliez nous expliquer par où sortir, avant que je vous interrompe…

— Pourquoi vous aiderais-je ? Je n’ai rien à perdre.

— Sauf votre vie, rappela Cundertol. Préférez-vous la technition à la fuite ?

— Je ne peux rien pour vous. Les sorties sont toutes bloquées. Notre unique chance est de nous cacher dans les salles techniques en attendant le départ des Ssi-ruuk.

— Je déteste me cacher. (Cundertol tira sur Harris, qui tomba raide mort.) Désolé, mon ami. Mauvaise réponse…

Jaina n’aurait jamais cru Cundertol capable de tuer de sang-froid. Salkeli tomba à genoux, s’attendant à subir le même sort. Mais Cundertol, d’un geste fluide, appuya le blaster contre la tempe de Malinza.

— Bien. Comme il ne semble pas y avoir d’autres options…

Jaina se figea. Elle n’était pas au bout de ses surprises. Le Premier ministre bakurien ouvrit la bouche et…

… Appela en ssi-ruuvi.

Une réponse leur arriva presque aussitôt.

Jaina jura à voix basse. Cundertol jubilait. Il savait que la jeune Jedi ne risquerait pas la vie de Malinza.

La jeune Jedi tenta de lui imposer une compulsion mentale à travers la Force.

— Libérez-la !

— Pas question.

— Qu’êtes-vous donc ?

— Je suis un être neuf, répondit Cundertol. Mais nous n’avons pas le temps d’en discuter. Allons plutôt rejoindre nos nouveaux maîtres.

Des bruits de pas retentirent dans le couloir. Les survivants se serrèrent les uns contre les autres. Son attention tournée vers les accès, Jaina se campa entre Cundertol et eux. Elle sentit que ses parents, Goure et deux gardes l’imitaient.

Si seulement ils avaient attaqué Cundertol quand ils en avaient l’occasion…

— Vous étiez au courant de l’attaque des Ssi-ruuk ! cracha Malinza, écœurée. Vous avez trahi Bakura. Vous ne valez pas mieux qu’Harris.

— Vous avez tort sur ce point, jeune fille, répondit Cundertol. Je suis bien meilleur que lui !

Jaina n’eut pas le loisir de se demander ce qu’il voulait dire… Six guerriers ssi-ruuvi apparurent sur sa gauche, brandissant des disques-mort. Le chef s’adressa en ssi-ruuvi au Premier ministre, qui répondit dans la même langue.

— C3PO ? demanda Yan.

— Il s’agit d’une salutation standard, dit le droïd. (Le saurien géant montra le corps d’Harris et siffla.) Maintenant, il réprimande le Premier ministre.

Un deuxième groupe arriva, sous la direction du plus grand Ssi-ruu que Jaina ait jamais vu : une magnifique guerrière rouge aux crêtes faciales prononcées qui portait un harnais noir orné de médailles d’argent tintant à chaque pas.

Cinq guerriers de taille normale et quatre Ssi-ruu dorés, des prêtres, la suivaient. Derrière venaient le Keeramak en personne, et des soldats p’w’ecks.

Ses mâchoires claquant comme pour gober des insectes, le Keeramak avança gracieusement. Il émit une série de sons flûtés.

— Rendez-vous sans délai, traduisit C3PO. Quand vous aurez été technitionnés, je vous promets de vous affecter à des tâches productives.

— On nous a affirmé que vous ne pratiquiez plus la technition, répondit Leia. Je suppose que c’était un mensonge…

Le Keeramak fit une révérence gracieuse.

— Un parmi d’autres, Leia Organa Solo… Mais nous avons perfectionné le processus. Il nous est désormais possible de garder l’énergie vitale presque indéfiniment, réduisant ainsi nos besoins. Certaines énergies, comme la vôtre, sont trop savoureuses pour que nous y résistions. Vous nous enrichirez pour des siècles !

Leia sortit son sabre laser – un réflexe, quand la diplomatie avait échoué sur toute la ligne.

— Vous n’aurez jamais mon énergie vitale ! jura-t-elle.

— Ni la mienne ! ajouta Jaina.

Le saurien recula.

— Le Keeramak a dit : « comme vous voudrez », traduisit C3PO.

— Ne soyez pas idiots ! lança Cundertol. Comprenez-vous ce qu’il vous offre ?

— Trop bien ! grogna Yan.

— Au contraire, vous n’avez rien saisi ! La technition n’est pas ce que vous croyez. Il ne s’agit pas d’une fin, mais d’un début. Une libération !

— Vous n’êtes pas sérieux ! s’exclama Leia.

— Imaginez le plaisir de contrôler votre propre vaisseau droïd, d’être le maître d’une propulsion interstellaire ! insista Cundertol. Pensez à la liberté que vous connaîtrez une fois débarrassés des contraintes de votre corps biologique. Vous vivrez éternellement !

— La liberté ? dit Jaina. Nous serions des esclaves…

— Des esclaves immortels ! Que représentent quelques années de servitude, en échange de l’immortalité ?

Soudain, la raison de la trahison de Cundertol devint claire pour tous.

— C’est ça qu’ils vous ont promis ? demanda Leia. L’immortalité ? Vous avez vendu votre planète et votre peuple contre la promesse d’une vie prolongée ?

— En fait, princesse, ils ne m’ont rien promis. J’ai compris tout seul les avantages de ce marché, et nous avons réglé les détails…

— Vous n’êtes sûrement pas naïf à ce point ! Si vous croyez que les choses se passeront comme ça…

— C’est déjà le cas ! Si vous refusez d’accepter la vérité, tant pis pour vous. En tout cas, votre sort est scellé.

Le Keeramak fit cliqueter ses griffes, et les guerriers p’w’ecks avancèrent vers les prisonniers. En cas de résistance, ils seraient les premiers à mourir. Jaina sentit son estomac se nouer à l’idée de devoir abattre des esclaves pour échapper à la technition…

Lwothin commandait les P’w’ecks. Il s’inclina devant le Keeramak, qui lança un cri puissant.

Inutile que C3PO traduise…, pensa Jaina.

Lwothin se redressa de toute sa hauteur. Prête à tout, la jeune Jedi activa son sabre laser.

Le reptile lâcha un cri terrifiant, leva son disque-mort et lui tira dessus à bout portant.

 

Les moteurs de la griffe de Jag chauffaient… sans pouvoir s’arracher aux rayons tracteurs du V’sett qui l’entraînait vers une centaine de chasseurs bakuriens. Une escadrille lentement aspirée par un orifice étroit, dans les boucliers de l’Errinung’ka. Deux vaisseaux de classe Fw’sen s’assuraient qu’il n’y aurait aucune résistance.

Ligotés comme ils l’étaient par les rayons, Fel et ses équipiers ne pouvaient rien faire, sinon communiquer par clics. Tout près de lui, Jag revit la pilote de l’aile Y, les mains crispées sur ses commandes.

Mais quand ils seraient passés de l’autre côté des puissants boucliers, tout serait terminé…

Je suis désolé, père…

Jag aurait tant voulu pouvoir parler une dernière fois à ses parents ! Toute sa vie, il avait cherché à leur faire honneur, à se montrer digne d’eux…

Comment aurait-il pu imaginer qu’il finirait comme ça ?

L’unité com se réactiva.

— Ici la capitaine Mayn. Le brouillage a été levé pour me permettre de m’adresser à tous sur une fréquence ouverte. Les chasseurs doivent se rendre, ou la planète sera bombardée. Salis D’aar serait la première cible. Dans l’intérêt des civils, je vous demande de cesser toute résistance.

Jag en fut stupéfait. Etait-ce vraiment Todra Mayn qui parlait ? La perspective d’une reddition lui retournait l’estomac.

— Si nous nous rendons, capitaine, répondit-il sur la même fréquence, nous mourrons et les civils aussi.

— Les Ssi-ruuk nous ont donné l’assurance que la planète serait traitée loyalement, si elle passe sous le contrôle de l’Imperium.

— Comme les P’w’ecks ? Nous deviendrons du bétail pour alimenter les chasseurs droïds !

— Tout, plutôt que la mort.

Au bruit que faisaient ses moteurs, Jag comprit qu’ils ne tiendraient plus très longtemps. S’il voulait en finir en beauté, il devrait agir vite.

— Faites-moi confiance, Jag ! supplia Mayn. Ils ont capturé Jaina…

Et alors ? Une vie vaut-elle celles d’une planète entière ?

Hébété, Jag coupa ses moteurs et laissa le bouclier envelopper son vaisseau.

La barrière isolait les condamnés du reste de l’univers. Avec ce calme soudain, Jag eut le sentiment d’être plongé dans un autre univers. Ailleurs, le combat continuait. Mais là, tout était paisible… Les prisonniers pouvaient seulement maudire leur malchance, et attendre.

 

Sans un cri, le Keeramak s’effondra.

La scène se figea.

Les Ssi-ruuk parurent stupéfaits par l’attaque de Lwothin.

Un liquide visqueux et gris suintant de la blessure, dans sa poitrine, le Keeramak gisait sur le sol. Les P’w’ecks profitèrent de la désorientation des Ssi-ruuk, et les disques-mort crépitèrent.

Aussi étonnée que les Ssi-ruuk, Jaina se ressaisit plus vite. De toute évidence, Lwothin et les P’w’ecks venaient de se rebeller contre leurs maîtres !

Mieux entraînés et mieux armés que les P’w’ecks, les Ssi-ruuk reprirent rapidement l’avantage. Jaina n’eut pas de mal à choisir son camp. Quand un guerrier ssi-ruuvi visa Lwothin, elle lui fît sauter son arme des griffes avec son sabre laser.

Le saurien avait un physique intimidant, mais elle s’était assez entraînée avec Saba Sebatyne pour se méfier de sa queue… Et elle disposait de la Force pour la guider. Par bonheur, les Ssi-ruuk étaient présents dans la Force, contrairement aux Yuuzhan Vong.

Elle esquiva les coups du Ssi-ruu, lui décochant un maître coup de pied dans la poitrine.

Il tituba. L’instant d’après, Jaina plongea sous sa garde et lui trancha le cou.

La créature se vida de son sang.

Un autre guerrier tenta d’embrocher Jaina avec son disque-mort. Elle pouvait moins facilement dévier le coup qu’avec un rayon laser, mais elle y parvint. Un P’w’eck sauta sur le dos du guerrier, le plaquant au sol. Jaina lui arracha son arme et la lança à Vyram, qui la saisit au vol et visa Cundertol.

— Si vous osez faire le moindre mal à Malinza, je tire !

Les adversaires se toisèrent du regard, immobiles au milieu du chaos. La mort de leur chef les décourageant, les guerriers ssi-ruuvi se laissèrent maîtriser sans opposer beaucoup de résistance.

Le Premier ministre baissa son arme quand le dernier guerrier se fut rendu.

— Vous avez tout gâché ! cria-t-il. Pour nous tous !

— Ah, ouais ? fit Yan. A part vous, personne ne s’en plaint !

Le chef du Mouvement d’Emancipation des P’w’ecks prit la parole d’un ton pressant.

— Lwothin vous demande de contacter nos chasseurs immédiatement, traduisit C3PO. Le brouillage a été annulé pour nous permettre de communiquer.

— Que dois-je leur dire ? demanda Leia.

Lwothin parla de nouveau.

— Oh ! fit C3PO. De ne pas résister – de se laisser capturer !

Leia ouvrit la bouche, mais Yan fut plus rapide.

— Personne ne donnera un tel ordre !

Lwothin exposa rapidement son plan. Quand il eut terminé, Jaina vit sa mère jeter un coup d’œil au cadavre du Keeramak.

— Comment être sûre que je n’enverrai pas ces pilotes dans un traquenard ?

— Vous ne le pouvez pas, répondit Lwothin par l’intermédiaire de C3PO. Mais si vous ne dites rien, ils sont perdus de toute façon. C’est leur seule chance. L’époque des mensonges est révolue. Nous sommes vos alliés et vos égaux. Nous ne vous trahirons pas.

L’instinct de Jaina lui soufflait de s’en remettre à Lwothin. Pour la première fois, elle eut le sentiment qu’ils venaient de lever le dernier voile sur le réseau de conspiration entourant Bakura…

Arrivant à la même conclusion, Leia sortit son comlink et appela le Sélonia.

Après un bref entretien, elle coupa la communication.

Ils entendirent ensuite le message du capitaine à tous les chasseurs.

— Ici la capitaine Mayn. Le brouillage a été levé pour me permettre de m’adresser à tous sur une fréquence ouverte…

Quand elle eut terminé, la voix de Jag monta du comlink.

— Si nous nous rendons, capitaine, dit-il sur la même fréquence, nous mourrons, et les civils aussi !

Jaina se détendit soudain. Quand Lwothin avait parlé des combats en orbite, elle avait aussitôt pensé à Jag… Faisait-il partie des morts ? Ou des prisonniers technitionnés… ?

— Les Ssi-ruuk nous ont donné l’assurance que la planète serait traitée loyalement, si elle passe sous le contrôle de l’Imperium.

— Comme les P’w’ecks ? Nous deviendrons du bétail pour alimenter les chasseurs droïds !

— Tout, plutôt que la mort !

Jaina attendit la réponse de Jag, mais rien ne vint. Elle sentit son indécision et son désespoir comme s’il était à ses côtés.

Mayn s’en aperçut aussi.

— Faites-moi confiance, Jag ! supplia-t-elle. Ils ont capturé Jaina…

Le mensonge fit sursauter la jeune Jedi, mais elle comprit que c’était la seule chose qui pousserait Jag à aller contre ses instincts.

Son silence radio en disait long…

Il avait capitulé.

— J’imagine que vous savez ce que vous faites, princesse, déclara Mayn sur une fréquence privée.

— Oui, Todra. (Leia regarda Lwothin d’un air menaçant.) Faites-moi confiance.

 

Toujours englué dans le filet des boucliers ssi-ruuvi, Jag bouillait intérieurement… Le brouillage étant revenu peu après la fin de la transmission, savoir ce qui se passait ailleurs lui était impossible. Il se sentait aussi isolé et impuissant que les autres pilotes…

Alors, quelque chose d’étrange survint. Ses détecteurs enregistrèrent un affaiblissement du rayon tracteur. Il vérifia ses écrans. Leur escorte n’avait pas bougé.

Les rayons tracteurs baissèrent encore d’intensité. Il s’aperçut que sa griffe avait retrouvé un peu de mobilité.

Il y eut encore une déperdition d’énergie, et il sentit ses espoirs se raviver. L’emprise des Ssi-ruuk se relâchait ! Il comprit ce qu’il se passait en regardant ses écrans.

Les vaisseaux droïds p’w’ecks qui avaient composé la « garde d’honneur » redirigeaient lentement leurs rayons tracteurs. Après avoir introduit une force de frappe intacte derrière les boucliers de l’ennemi, ils la libéraient graduellement pour que les Ssi-ruuk ne se doutent de rien… Les P’w’ecks se rebellaient contre leurs maîtres – pour de bon cette fois… Et ils utilisaient la Flotte Bakurienne comme arme !

Jag cliqua trois fois pour attirer l’attention de ses équipiers. Les pilotes de Soleils Jumeaux répondirent aussitôt. Il n’avait pas beaucoup de temps. Il devrait agir avant que les Ssi-ruuk remarquent ce qui se passait.

Quand les rayons tracteurs faiblirent encore, Jag cliqua deux fois, rapidement, puis encore deux fois. Le code pour « attaque ». En un instant, Fel et ses pilotes passèrent à pleine accélération, fonçant sur les Ssi-ruuk.

Surpris, les V’sett se retrouvèrent englués par les rayons tracteurs des vaisseaux droïds… Tout se joua en quelques secondes. Les Ssi-ruuk détruits, les prisonniers furent libérés des rayons tracteurs.

Le brouillage disparut. Jag ouvrit toutes les fréquences, espérant remettre au plus vite de l’ordre dans les formations de chasseurs.

— Que tout le monde reste calme ! Maintenez votre formation d’origine. Ne tirez pas sur les vaisseaux droïds. Je répète, ne tirez pas sur les vaisseaux droïds ! Des P’w’ecks les pilotent, et ils sont de notre côté. Ils nous ont amenés ici !

— Et à quoi ça nous sert ? demanda un pilote bakurien.

— Nous avons une cible, répondit Jag en se dirigeant vers le transporteur ssi-ruuvi. Nous sommes à l’intérieur du périmètre des boucliers, et leurs escadrons de défense sont dehors. Ils ne peuvent pas appeler de renforts sans être attaqués par le Sentinelle ou le Sélonia. Les P’w’ecks nous ont donné une chance, et nous allons la saisir !

Le double changement d’allégeance des P’w’ecks avait de quoi déconcerter les pilotes bakuriens, mais ils obéirent sans discuter aux ordres de Jag.

Laissant les P’w’ecks en paix, ils se remirent en formation et se préparèrent à attaquer le transporteur. Une dizaine de chasseurs V’sett jaillirent des hangars, mais les vaisseaux droïds eurent vite fait de les éparpiller.

— Visez les générateurs de rayons tracteurs, ordonna Jag, puis les boucliers. Essayez de limiter les dégâts. Nous avons des amis prisonniers à bord, et je veux les récupérer vivants !

Il se lança dans la mêlée, visant les canons à ions du transporteur. Il en détruisit trois, des membres de son escadron éliminant les autres.

Le vaisseau réagit lentement, sans doute à cause des P’w’ecks révoltés qu’il transportait. Mais cet avantage tactique ne durerait pas longtemps. Long de sept cent cinquante mètres, le transporteur aurait pu affronter facilement une centaine de chasseurs.

Pourtant, ils feraient de leur mieux.

 

La nouvelle de l’attaque des chasseurs contre le transporteur parvint au Sélonia quelques instants après le rétablissement des communications. Jaina n’eut pas le temps d’entendre les détails. Un mouvement soudain attira son attention. Sabre laser au poing, elle virevolta, et vit l’ancien Premier ministre prendre la fuite.

Etendu à terre, Vyram se frottait le bras droit.

— Désolé… Il a été si rapide !

Jaina se lança à la poursuite de Cundertol. Pas question de le laisser s’échapper ! S’il trouvait un communicateur, leur plan serait éventé et Jag serait fait prisonnier pour de bon.

Vyram n’avait pas menti… Cundertol courait à une vitesse hallucinante.

Des P’w’ecks convergèrent vers Jaina, bloquant le chemin du stade. Soucieux de les éviter, Cundertol avait bifurqué dans un autre passage, qui conduisait probablement vers la sortie que Malinza avait voulu emprunter plus tôt.

Sans prendre le temps d’expliquer la situation aux P’w’ecks, Jaina continua la poursuite.

Cundertol courait toujours, infatigable. D’où tirait-il pareille énergie ? Malgré la Force qui augmentait sa propre endurance, elle commençait à fatiguer.

Une porte claqua devant la jeune Jedi… Cundertol avait quitté l’escalier au cinquième niveau du sous-sol… Dès que Jaina poussa la porte pour passer, elle fut attaquée. Se défendant avec la Force, elle roula à l’écart, se réceptionna et se releva, en garde. Elle vit alors Cundertol filer au bout d’un nouveau couloir…

Et esquiva de justesse un boulon qui visait sa tête.

Une fronde ? Mais le fuyard n’avait rien à la main ! Elle n’eut pas le temps de s’attarder sur la question, car un deuxième boulon la frôla de si près qu’elle le sentit effleurer ses cheveux.

Il les lance à main nue ! comprit-elle, sidérée.

Sans laisser au Premier ministre le loisir d’améliorer sa technique, Jaina riposta par une poussée de Force qui aurait fait tomber n’importe qui…

Pas Cundertol. Il tourna les talons et s’enfuit par une autre porte à une vitesse déconcertante.

Echaudée, Jaina le suivit plus prudemment.

Qui était-il en réalité ? D’où tirait-il cette force et cette rapidité phénoménales ? Elle ne le rattraperait jamais… Il lui fallait imaginer une autre solution.

Le bruit de course cessa soudain.

Jaina hésita, puis approcha du couloir, qui paraissait vide.

— Vous ne vous en tirerez pas, Cundertol !

S’il répondait, elle espérait avoir une idée de sa position.

— Ah, non ? fit le fuyard d’une voix étouffée. Vous allez m’arrêter, gamine ?

— C’est mon intention.

— Désolé, mais vos intentions ne comptent pas !

Il se laissa tomber du plafond derrière elle.

Jaina pivota… Trop tard. Il la renversa comme, une poupée de chiffon.

Elle se releva et fonça sur lui. Il esquiva le coup et l’expédia à plus de cinq mètres en arrière.

A en juger par son expression, Cundertol n’avait qu’une idée en tête : fuir. Si Jaina lui barrait la route, il l’éliminerait.

Elle se releva vivement et, sabre laser activé, le tint en respect. Puis elle revint à la charge.

Il esquiva encore, ripostant par un coup terrible au plexus solaire… Jaina atterrit sur son postérieur, qui en resta endolori. Dans sa chute, elle avait lâché son sabre laser. Avant que la jeune Jedi puisse le rappeler à elle par la Force, Cundertol se jeta sur elle.

— Vous avez bien combattu !

— Et ce n’est pas fini !

Entendant le sabre laser voler dans les airs derrière lui, Cundertol se jeta sur le côté… Trop tard pour éviter la lame crépitante. Hurlant de douleur, il se tint un bras.

Jaina se releva péniblement. Tout tournait autour d’elle. Son sabre laser revint se nicher dans sa paume.

Cundertol s’était de nouveau enfui… Elle allait se relancer à sa poursuite, quand un bruit de course retentit derrière elle.

— Jaina ! cria Leia. Ça va ?

— Cundertol…

Haletante, la jeune Jedi tendit un bras dans la direction qu’il avait prise.

— Ne t’en fais pas, nous l’aurons ! lui lança son père au passage.

Il conduisait un groupe d’humains et de P’w’ecks.

— Sois prudent ! cria Jaina.

Leia l’aida à se rasseoir.

La jeune Jedi lutta contre la nausée. Cundertol l’avait frappée plus fort qu’elle ne l’aurait cru…

— Ça va aller, dit sa mère. Tout ira bien !

Quelque chose, dans le duel que Jaina venait de livrer contre Cundertol, la troublait. Mais quoi ? Elle l’avait blessé. Au bras…

Soudain, elle le vit, gisant dans la pénombre, à quelques mètres. Elle se dégagea de l’étreinte de sa mère et alla inspecter l’objet, sidérée.

— C’est quoi ? demanda Leia.

— Son bras !

Elle lui avait tranché le bras, juste sous le coude !

Mais il n’y avait pas de sang sur le moignon. Certes, un sabre laser cautérisait instantanément les blessures, mais l’absence de sang n’était pas la seule anomalie. Il y avait aussi l’odeur…

… Celle de la chair synthétique brûlée.

— Ils le rattraperont, Jaina. Surtout s’il est blessé…

Jaina comprit soudain qu’elle avait combattu un droïd.

— Non, ils ne le rattraperont pas. Même blessé, il s’échappera.

Avant qu’elle puisse s’expliquer, un discours en p’w’eck retentit.

— Excusez-moi, maîtresse, intervint C3PO. Lwothin annonce que l'Errinung’ka s’est rendu aux P’w’ecks. Le Firrinree ne devrait pas tarder à l’imiter.

Ça compensera la perte du Gardien et de l’Intrus, se dit Jaina.

— Et Jag ? demanda-t-elle. Des nouvelles ?

— Oui, répondit Leia. Il mène l’attaque contre le Firrinree en ce moment même.

Elle capta le message que sa mère voulait lui faire passer.

Tu n’y peux rien. Laisse tomber.

Elle avait peut-être raison, mais Jaina ne se détendrait pas avant de revoir Jag à ses côtés, et d’être sûre qu’ils avaient tous les deux échappé à la technition…

L'HéŽréŽtique de la Force T2 - Les Réfugiés
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